lundi, juin 30, 2008

LE VISITEUR DU SOIR (B. Traven)

Ce livre est un recueil de nouvelles ayant pour cadre le Mexique.
(le personnage qui parle, un Blanc, vit seul et vient rendre visite à son plus proche voisin, un Blanc qui est docteur, quand la solitude lui pèse) .Le docteur n'était pas très bavard. Vivre seul dans la jungle rend silencieux, même si l'on n'en pense pas moins. Il n'y a pas une seconde du jour ou de la nuit où la jungle ne vous parle, que ce soit de ses innombrables voix ou de son perpétuel mouvement de croissance et de pourrissement. On en vient inévitablement à la conclusion que la vie n'a qu'une seule signification: il faut la savourer tant qu'elle dure et en tirer le plus possible, car la mort est en nous depuis notre naissance.page 19
Je n'avais pas vu un livre depuis plus d' un an. J'avais eu faim de lecture comme un homme vivant dans une grande ville peut avoir faim de forêts vertes, de lacs bleus, de ruisseaux murmurants et de ciels sans nuages. page 28
Après avoir passé trois semaines au Mexique, Mr Winthrop , convaincu qu'il connaissait le pays à fond, qu'il avait tout vu et savait tout sur ses habitants, de leur caractère et de leur mode de vie, regagna ce bon vieux Nooyorg (New York) et fut heureux de se retrouver dans un pays civilisé. page 94
(Un padre au xv1è siécle rencontre un chef de clan indien , il a parlé de Jésus pendant trois jours aux Indiens pour les convertir). Alors le chef indien dit: "Saint père blanc, et noble messager de ton dieu, je dois te dire , à présent, ce que nos dieux nous ont dit pendant ces trois jours et ces trois nuits de jeûne et de méditation...Un dieu qui, par le seul fait qu'il est dieu, n'est pas capable de se faire respecter au point de se faire cracher au visage, fouetter, insulter méchamment, un tel dieu n'est pas fait pour nous. Celui qui ne se défend pas quand on l'attaque ou l'insulte, n'est pas un dieu pour nous. Celui qui, cloué à une croix, n'est pas assez fort pour se libérer par sa puissance divine, ne pourra jamais sauver un Indien du mal qui lui est fait par ses ennemis.....Si ton dieu était le dieu que tu dis, il ne demanderait même pas aux gens de croire en lui, de le prier ou de l'adorer. Ma mère m'a donné tout ce qu'elle avait, seulement par amour pour moi, sans me demander de croire en elle ou de la prier. Si j'avais été assez vil pour l'insulter - ce que mes dieux m'empêcheraient de faire, même en rêve- elle m'aurait quand même tout donné. Je te le dis, ma mère est beaucoup plus grande que ton dieu, son amour est beaucoup plus infini, et elle n'est qu'un être humain. pages 203, 204
Voici , mon saint père blanc, ce que notre dieu à nous a mis dans nos coeurs, et ce sera la dernière fois que j'aie à te le dire avant que nous regagnions notre belle tierra: notre dieu, lui, meurt chaque soir pour nous, ses enfants. Il meurt chaque soir, pour nous donner la fraîcheur de la nuit, la paix et le silence de la nuit, afin que nous puissions nous reposer, hommes et bêtes. Notre dieu meurt chaque soir dans une gloire dorée, sans être insulté, sans qu'on crache sur lui et le couvre de boue. Il meurt en beauté, glorieusement, comme un vrai dieu. Mais il ne meurt pas pour toujours. Le matin, il naît de nouveau., plus beau que jamais, en écartant les voiles de la mort, et son épée d'or brille au firmament, nous disant qu'il est prêt à combattre les dieux de l'ombre qui menacent les peuples de la terre. Et avant même qu'on s'en rende compte, il est là, devant nos yeux, et il y reste, grand , puissant, dominant l'univers de sa beauté...Notre dieu, lui, prodigue la lumière, la chaleur, la beauté et la fertilité; il donne aux fleurs leurs couleurs et leur parfum; il apprend aux oiseaux à chanter; il fait pousser le maïs; joue avec les nuages dans un océan bleu et or. Comme ma mère, il donne et donne sans cesse, sans jamais demander de prières, sans attendre qu'on l'adore, sans exiger obéissance ou foi, sans jamais condamner qui que ce soit sur terre. Et quand le soir revient, il meurt de nouveau, avec un sourire de gloire sur son visage et en bénissant de son dernier rayon ses enfants indiens. Et le lendemain matin il recommence à donner...Il est le grand dieu doré des Indiens, éternellement jeune, éternellement beau, éternellement ressuscité. Voilà les pensées qu'il a mises dans nos coeurs et voici ce que j'ai à te dire, saint père blanc: " Chers fils indiens de ce beau pays qui est le vôtre, ne changez jamais votre dieu pour aucun autre." pages 205,206
(Un Indien rencontre l'Homme en Os qui lui prédit qu'il deviendra riche). "Vois-tu, compadre, j'ai été heureux, à ma manière. Bien sûr, j'ai toujours eu faim, j'ai toujours été fatigué, j'ai toujours dû lutter pour vivre, mais après tout, il en va ainsi pour tous les gens de mon espèce. Nous acceptons cette vie car elle nous a été donnée, et c'est pour cela que nous nous sentons heureux: parce que nous essayons toujours de tirer le meilleur du pire." page 223

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