mardi, août 30, 2022

CHIEN 51 Laurent GAUDE ) 2022

 C'est dans une salle sombre, au troisième étage d'une boîte de nuit fréquentée du quartier RedQ, que Zem Sparak passe la plupart de ses nuits.  Là, grâce aux visions que lui procure la technologie Okios, aussi addictive que l'opium, il peut enfin retrouver l'Athènes  de sa jeunesse. Mais il y a bien longtemps que son pays n'existe plus. Désormais, expatrié, Zem n'est plus qu'un vulgaire "chien" , un policier déclassé fouillant la zone 3 de Magnapole sous les pluies acides et la chaleur écrasante. 

Un matin, dans ce quartier abandonné à sa misère, un corps retrouvé ouvert le long du sternum va rompre le renoncement dans lequel Zem s'est depuis longtemps retranché. Placé sous la tutelle d'une ambitieuse inspectrice de la zone 2, il se lance dans une longue investigation. Quelque part, il le sait, une vérité subsiste. Mais  partout, chez GoldTex, puissant consortium qui assujettit les pays en faillite, règnent le cynisme et la violence. Pourtant, bine avant que tout ne meure, Zem a connu en Grèce, l'urgence de la révolte et l'espérance d'un avenir sans compromis. Il a ailé. Et trahi. Sous les ciels en furie d'une mégalopole privatisée, Chien 51 se fait écho de notre monde inquiétant, à la fois menaçant et menacé. Mais ce roman abrite aussi le souvenir ardent de ce qui fut, à transmettre pour demain, comme un dernier rempart à notre postmodernité.

jeudi, août 25, 2022

BONJOUR L'ANGOISSE ET AUTRES IMPROMPTUS. ( André COMTE- SPONVILLE ) 1996

 Présentant cet ouvrage paru en 1996 et alors titré Impromptus, m'auteur écrivait  " Philosopher, c'est penser  sa vie et vivre sa pensée. Entre les deux, un décalage subsiste pourtant, qui nous constitue et nous déchire. C'est de quoi la philosophie souvent, n'est que dénégation. A quoi bon tant penser, si c'est pour vivre si peu? "....".Bonjour l'angoisse" , qui est le premier texte de ce recueil, apprend à accepter l'angoisse plutôt que la fuir. 

Bonjour l'angoisse.

Que serait l'homme sans l'angoisse? L'art, sans l'angoisse? La pensée , sans l'angoisse?  Puis la vie est à prendre ou à laisser, et c'est aussi ce que l'angoisse , douloureusement, nous rappelle. Il n'y a pas de vie sans risque.   Pas de vie sans  souffrance. Pas de vie sans mort. page 6

Va-t-on renoncer à penser, parce que cela angoisse? A vivre, parce que cela fait peur? A aimer parce que cela fait mal? Acceptons plutôt, autant que nous le pouvons, malgré tout, au moins un peu, au moins parfois, et c'est justement le signe de notre santé.,  acceptons plutôt de souffrir et de trembler. page 11....Rien n'est jamais acquis, rien n'est jamais promis, jamais que la mort. page 13

Qu'est-ce que la santé psychique? La capacité peut-être d'affronter  le réel  et le vrai sans y perdre toute force, toute joie, toute liberté. page 16

L'argent.

Mieux vaut dire le mal qui est  que le bien qui n'est pas. page 23...;On ne m'ôtera pas l'idée  que le christianisme, dans  son inspiration, est de gauche, et que la gauche, plutôt est chrétienne ou judéo-chrétienne...;C'est le contraire du paganisme, avec ses dieux de  castes, de clans.  C'est la contraire de la richesse, et du culte de la richesse. Rigueur des évangiles:" vous ne pouvez servir deux maîtres ..;Vous ne pouvez servir Dieu et l'Argent. page 23

Seuls ceux qui se savent mortels ont assez d'argent ou à qui le présent, et ce sont souvent les mêmes, suffit. page 29

Nul ne vaut par ce qu'il possède, ni par ce qu'il convoite. On ne vaut que par ce qu'on donne, et tout ce qu'on ne donne pas est perdu, et nous perd. page 30

La correspondance. 

Ecrire c'est toujours écrire à quelqu'un ou pour quelqu'un, fût-il inconnu, fût-il universel.....Un vivant s'adresse à un vivant, dans le secret de vivre. Une solitude se confie à une autre, dans le mystère d'e^tre soi dans l'inconnu d'aimer ou d'être deux. Un individu se livre là comme il peut, et comme il veut. page 38

Le style n'est pas ce qui importe....Une lettre vaut d'abord par son intimité, par sa douceur, parc e qu'elle contient d'amour ou de secret....Il suffit d'être vrai. Il suffit d'écrire au plus près de la vie telle qu'elle est, telle qu'elle semble, telle qu'elle passe et demeure......page 39

Pourquoi écrit-on une lettre? Pour habiter l'essentielle solitude, l'essentielle séparation, l'essentielle et commune sagacité. Pour décrire le temps qu'il fait, le temps qui passe. Pour raconter ce qu'on devient, ce qu'on est et ce qu'on attenf=d. Pour dire la distance , sans l'abolir. Le silence, sans le corrompre.Le moi, sans s'y enfermer. Cela ne tient pas un lieu de parole. Cela ne tient lieu de rien.  Et rien non plus n'ne tient lieu. Les vraies lettres, celle qu'on aime recevoir, come l'amour, come un cadeau, et c'en est un...page 43

Le goût de vivre. 

La vie est bonne par(dessus tout; elle est bonne par elle-même; le raisonnement n'y fait rien. On n'est pas heureux pour voyage, richesse, succès , plaisir, On est heureux parce qu'on est heureux.  Le bonheur est la saveur de la vie. page 45

"IL faut vivre sa vie avant de la penser. " disait Delbos.  page 52

(Gide) " Un eas assez constante del amort n'a donné pas assez  de prix au pus petit instant de ta vie. " Vivre, c'est mourir.  et la vie  n'en est que plus belle, qui porte en soi la mort. page 54...Puis, il y a la solitude. ..chacun est seul face à l'autre, et nul plaisir , même simultané n'est commun.  page 54

Mourir guéri. 

Vivre, c'est vieillir disait Montaigne.  et vieillir, c'est mourir par morceaux.  Contre quoi, la médecine n'y peut rien. page 66

...En vivant dans le plein jour de la vérité:  en acceptant la vie telle qu'elle est , si on le peut, en acceptant aussi la mort, la vieillesse, la maladie....Et en acceptant l'angoisse ou l'horreur si on ne le peut pas. page 69

Grande formule de Montaigne: " Tu n meurs pas de ce que tu es malade, tu meurs de ce ce que tu es vivant". page 72


jeudi, août 18, 2022

UNE SI LONGUE LETTRE ( Mariana BA) 1979

 Une si longue lettre est une œuvre majeure, pour ce qu'elle dit de la condition des femmes. au cœur de ce roman, la lettre que l'une d'elles Ramatoulaye, adresse à sa meilleure amie, pendant la réclusion traditionnelle qui suit son veuvage. Elle y évoque leurs souvenirs heureux d'étudiantes impatientes de changer le monde, et cet espoir suscité par les Indépendances. Mais elle rappelle aussi les mariages forcés, l'absence de droits des femmes. et tandis que sa belle-famille vient prestement reprendre les affaires du défunt, Ramatoulaye évoque alors avec douleur le jour où son mari prit une seconde épouse, plus jeune, ruinant vingt-cinq années de vie commune et d'amour. La Sénégalaise Mariana Bâ est la première romancière africaine  à décrire avec une telle lumière la place faite aux femmes dans la société. 

Modou Fall est bien mort, Aïssatou. En attestent le défilé ininterrompu d'hommes et de femmes qui " ont appris", les cris , les pleurs qui m'entourent. page 15

J'espère bien remplir mes charges. Mon cœur  s'accorde aux exigences religieuses. Nourrie, dès l'enfance, à leurs sources rigides, je crois que je ne faillirai pas; Les murs qui limitent mon horizon pendant quatre mois et dix jours ne me gênent guère. J'en ai moi assez de souvenirs à ruminer. et ce sont eux que je crains car ils ont le goût de l'amertume. page 25

"Le Mirasse" ordonné par le Coran, nécessite le dépouillement d'un individu mort de ses secrets les plus intimes. Il livre ainsi à autrui ce qui fut soigneusement dissimulé. ....Je mesure avec effroi, l'ampleur de la trahison de Modou. L'abandon de sa première famille ( mes enfants et moi) était conforme à un nouveau choix ce  vie. Il nous rejetait. Il orientait son avenir sans tenir compte de notre existence. ...Mort sans un sou d' économie. page 26

Chaque vie recèle une parcelle d'héroïsme, un héroïsme obscur fait d'abdications, de renoncements et d'acquiescements, sous le fouet de la fatalité. page 30

(celui qui devint son mari est allé en France pour études) ..dans tes lettres, " ce que la femme blanche possède  de plus que la Négresse sur le plan strictement physique est la variété dans la couleur, l'abondance, la longueur et la souplesse de la chevelure. Il y a  aussi le regard qui peut être vert, bleu, souvent couleur de miel neuf; page 34

Je n'oublierai  jamais la femme blanche qui, la première,  a voulu pour nous, un destin "hors du commun" Notre école......Nous sortir de l'enlisement des traditions , superstitions et mœurs, nous faire apprécier de multiples civilisations sans reniement de la nôtre, élever notre vision du monde, cultiver notre personnalité, renforcer nos qualités, mater nos défauts, faire fructifier en nous les valeurs de la morale universelle, voilà la tâche  que s'était assignée l'admirable directrice.  Le mot "aimer avait une résonnance  particulière en elle; Elle nous aimait sans paternalisme, avec nos tresses debout ou pliées,  avec nos camisoles, nos pagnes. Elle sut découvrir et apprécier nos qualités. page 38

Que feront ceux qui ne réussissent pas? L'apprentissage du métier traditionnel apparaît dégradant à celui qui  a un mince savoir livresque; On rêve d'être commis,. On honnit la truelle.  La cohorte des sans -métiers  grossit les rangs des délinquants. page 42

Et nous vivions . Debout dans nos classes surchargées, nous étions une poussée  du gigantesque  effort à accomplir, pour la régression de l'ignorance. page 50

Privilège de notre génération, charnière entre deux périodes historiques, l'une de domination, l'autre d'indépendance; nous étions restés jeunes et efficaces, car nous étions porteurs de projets. L'indépendance acquise, nous assistions à l'éclosion d'une république, à la naissance d'un hymne national et à l'implantation d'un drapeau. page 53

( Le mari de l'amie à qui la lettre est adressée prend une seconde épouse) Alors, tu ne comptais plus.  Le temps et l'amour investis dans ton foyer? Des bagatelles vite oubliées. tes fils? Ils ne pesèrent pas lourd dans cette réconciliation d'une mère et de son "seul homme"; tu ne comptais plus, pas plus que tes quatre fils: ceux-ci ne sauront jamais les égaux de fils de la petite Nabou. ..tes fils ne comptaient pas.  La mère de Mawdo, princesse, ne pouvait se reconnaître dans le fils d'une bijoutière. Mawdo ne te chassait pas. Il allait à son devoir et souhaitait que tu restes. La petite Nabou restait chez sa mère; c'est toi qu'il aimait. Tous les deux jours, il se rendait la nuit chez s amère, voir l'autre épouse pour que sa mère " ne meure pas"; pour "accomplir un devoir".  Comme tu fus plus grande que ceux qui sapaient ton bonheur. page 63  Tu choisis la rupture, un aller sans retour avec tes  quatre fils, en laissant sur le lit qui fut vôtre,  cette lettre destinée à Mawdo et dont je me rappelle l'exact contenu. "....je me dépouille de ton amour, de ton nom. Vêtue du seul habit valable de la dignité, je poursuis la route. Adieu. " Aïssatou. page 64

Et tu partis. Tu eus le surprenant courage  de t'assumer.  Tu louas une maison et t'y installas.  Et au lieu de regarder en arrière, tu fixas l'avenir obstinément. Tu t'assignas un but difficile. Et plus que ma présence, mes encouragements, les livres te sauvèrent. Puissance des livres,  invention merveilleuse de l'astuce intelligente humaine.  Signes divers,  sons différents qui moulent le mot. Agencement de mots d'où jaillissent  l'Idée, la Pensée,  l'Histoire, la Science,  la Vie.  Instrument  unique de relation, de culture, moyen inégalé de donner et de recevoir.  Les livres soudent des générations au même labeur continu qui fait progresser. Ils te permirent de te hisser . Ce que la société refusait, ils te l'accordèrent: des examens passés avec succès, te menèrent  toi aussi en France. L'école d'Interprétariat d'où tu sortis, permit ta nomination à l'ambassade du Sénégal  aux Etats-Unis. Tu gagnes largement ta vie. Tu évolues dans la quiétude, comme tes lettres me le disent.....page 66

(le mari de Aïssatou ) Il ravalait la petite Nabou au  range de "mets." Ainsi, pour changer de  "saveur" les hommes trompent leurs épouses. J'étais offusquée. page 68

Mon drame survint trois ans après le tien. Mais, contrairement à ton cas, le point de départ ne fut pas ma belle-famille. Le drame prit racine en Modou lui-même....puis, un jour, en revenant de l'école, Daba ( sa fille) m'avoua que Binetou avait un sérieux problème. - "Le vieux des robes " prêt à porter" veut épouser Binetou. Imagine un peu. Ses parents veulent la sortir de l'école, à quelques mois du bac , pour la marier au vieux. - Conseille-lui de refuser dis-je..... - Et si l'homme en question lui propose une villa, la Mecque pour ses parents, voiture , rente mensuelle, bijoux?  - Tout cela ne vaut pas son capital jeunesse"...."Maman! Binetou, navrée,  épouse son  "vieux" . sa mère a tellement pleuré. elle l'a supplié de lui donner "une fin heureuse, dans une vraie maison" que l'homme leur a promise. Alors, elle a cédé. " page 70

Binetou, une enfant de l'âge de ma fille Daba, promue au rang de co-épouse et à qui je devais faire face. page 76...Binetou est un agneau immolé comme beaucoup d'autres sur l'autel du "matériel".  page 77..;Partir?  recommencer à zéro, après avoir vécu vingt-cinq années avec un homme, après avoir mis au monde douze enfants...Partir! Tirer un trait sur le passé. Tourner une page ....page 78

Et au grand étonnement de ma famille désapprouvée unanimement par mes enfants ..;je choisis de rester.....Je pleurais tous les jours. Dès lors, ma vie changea...le vide m'entourait....page 88...Je survivais. En p)lus de mes anciennes charges, j'assumais celles de Modou... Je survivais.  Je me débarrassais de ma timidité pour affronter seule les salles de cinéma, je m'asseyais à ma place, avec de moins en moins de gêne, au fil des mois. On dévisageait la femme mûre sans compagnon. Je feignais l'indifférence, alors que ma colère martelait mes nerfs et que mes larmes embuaient mes yeux. Je mesurais aux regards étonnés, la minceur de la liberté accordée aux femmes. Les séances de matinée me comblaient..Le cinéma, quel dérivatif puissant  à l'angoisse...;Je survivais...J'assignais à la radio un rôle consolateur. ...pages 98, 99, 100, 101

Tu me diras: " la vie n'est pas lisse. On  bute sur des aspérités page 105

( un ancien prétendant, Daouda Dieng) " Elle doit bien se porter  cette assemblée masculine!  " Je donnais un ton taquin à mon propos, tout  en roulant mes yeux.  - Toujours frondeuse, Ramatoulaye. Pourquoi cette affirmation ironique et cette qualification vexante, alors qu'il y a  des femmes  à l'assemble". - Quatre femmes, Daouda sur  sur une centaine de députés. Quelle dérisoire proportion! Même pour une représentation régionale. ..;Presque vingt ans d'indépendance! A quand  la première femme ministre.. Pages 112, 113 " Quand la société éduquée arrivera-t-elle à se déterminer non en fonction du sexe, mais des critères de valeur? page 114

Etre femme! Vivre en femme! Ah Aïssatou!  page 120

Le parti unique ne traduit  jamais l'expérience unanime des citoyens. Si tous les individus étaient du même moule, ce serait l'épouvantable collectivisme. Les différences engendrent des chocs qui peuvent être bénéfiques au développement d'un pays si elles émanent de patriotes vrais qui n'ont d'ambition que le bonheur des citoyens.  page 121

Le rêve d'une ascension sociale fulgurante pousse les parents à donner plus de savoir que d'éducation à leurs enfants;  page 136..  L'appétit de vivre tue la dignité de vivre. page 136

On est mère pour comprendre l'inexplicable. On est mère pour illuminer les ténèbres. On est  mère  pour couver, quand les éclairs zèbrent la nuit, quand  le tonnerre viole la terre, quand la boue enlise. On est mère pour aimer, sans commencement, ni fin. page 153



jeudi, août 11, 2022

DIX YUANS, UN KILO DE CONCOMBRES ( Celia LEVI) 2014

 Shanghaî aujourd'hui. Des laissés-pour-compte du "miracle économique chinois" tentent de survivre dans leurs logements insalubres , en attendant d'être expulsés par les promoteurs. Parmi eux, Xiao Fei épris de savoir et de tradition vivant dans la nostalgie de la grandeur passée de sa famille. Des Chinois lettrés qui avaient déjà tout perdu, une première fois, au moment de la Révolution Culturelle. Stoïque en apparence, mais chaque jour plus humilié par la situation des siens, Xiao Fei se réfugie dans des rêveries plus vaines les unes que les autres. Se remettre à la calligraphie. Devenir l'un de ces "dissidents" dont raffolent les médias occidentaux. Connaitre l'amour avec leur jeune cousine américaine, une fille d'expatriés revenue à Shanghaï pour y apprendre le chinois.  Pendant ce temps, la destruction fait rage autour d'eux. Leur misère s'accroît. Bientôt la solidarité entre voisins et parents ne suffira plus. Tout cède. Et le pire est encore à venir. 

" Je suis l'Histoire que les hommes ne voient pas, je suis la haine que chacun porte en soi, je suis les enfants qui rient au bord des sources claires et je suis ces vieux qui meurent dans les hospices. J'ai été engendré, j'ai engendré à mon tour, j'ai garanti le cycle funeste de la vie" page 11

Il passa devant une synagogue. Les juifs, comme nous, ils ont eu Hitler, nous avons eu Mao, ils ont dû se cacher, fuir leur patrie. ...Il se dit aussi  qu'un jour, il rentrerait dans la synagogue pour voir. page 19

Xiao Xiao , sans mépriser les paysans  et les ouvriers, considérait le travail intellectuel comme supérieur. page 30 

Il se montait la tête. Sa colère montait, il lui fallait un exutoire. C'était la nouvelle génération. Ils ne connaissaient rien. Ils n'avaient pas vécu la Révolution Culturelle, ils étaient gâtés, alors que lui n'avait rien eu, maintenant , c'était trop tard. Il était comme ces machines qu'on l'on jetait à la casse. Il n'avait aucune compétence, aucun diplôme. Il comprit qu'il ne s'appartenait pas, il faisait partie d'un tout, son pays, une structure sociale à l'intérieur de laquelle il devait exercer une fonction. page 37 

Le toit devait être réparé, la parquet aussi.  Une colonie de cafards s'était installée à l'endroit de la latte manquante.  Xiao Xiao ne trouvait jamais le temps ni le courage de remédier à cette situation.  IL hésitait toujours entre ces deux tâches ne sachant laquelle méritait la priorité. ...La maisonnée était en ébullition à l'approche du mariage de la collègue de Bei Bei...Le mariage aurait lieu dans un grand hôtel du Pudong. " le plus chic". Les parents de  Zhuang Jin s'étaient endettés pour participer aux frais du mariage.  Elle porterait trois robes, la première serait blanche, à l'occidentale, la deuxième violette piquée de diamants, et la troisième rouge , à la chinoise. page 51

On l'avait trop gâté et ce, depuis son  jeune âge. Il se rappelait que Vieux Père l'emmenait au parc en bicyclette, assis sur son guidon. Il lui offrait tout ce qu'il voulait et cédait à tous ses caprices. Maintenant, c'est un fainéant qui ne savait rien faire. page 68

XiaoXiao aimait les musées autant que les bibliothèques, il y éprouvait un sentiment  analogue à la légitimité et d'anonymat. Il savait que cet anonymat était sélectif, qu'étaient réunies dans ces lieux des personnes  de culture, qui avaient le loisir et la curiosité d'errer entre les vases, les statuettes, comme on chemine à travers les lignes d'un vieux manuscrit. Il se sentait à l'aise, il était  en terrain connu. page 85

La nuit,  il ne réussit ps à fermer l'œil.  Il se sentait inutile. page 95

Une lettre de la ville informait les habitants du lilong que des experts passeraient  dans la semaine  visiter leur appartement. Il n'était plus question des nouveaux logements...BeiBei commençait à s'inquiéter un peu, elle continuait malgré tout à plaisanter avec lui. Les experts vinrent avec des mètres et des instruments de mesure. Cela fit à tout le monde une grosse impression. On les chassait donc. page 150

es événements s'étaient précipités.  Il y avait des problèmes dans la construction des logements, un jour, c'était la conformité aux normes, un autre, de terrain à assainir. A la place, on leur proposait des indemnités ridicules qui s'étaient présentes comme mirobolantes: " le rachat d'une propriété qu'après tout vous n'avez pas acquise". L'avocat s'était soudainement volatilisé et on  n'arrivait pas à les expulser du quartier. ...On était allé se plaindre à la mairie. On leur répondait toujours la même chose: ' il faut accepte de partir".  pages 153, 154...Vers la fin du mois d'août, ils reçurent un courrier de mise en demeure. Ils devaient quitter le lilong avant le 1er  novembre. page 157

Xiao Xiao était pris d'abattement, les communistes  les avaient dépossédés de leur belle maison près du canal, maintenant , on leur retirait  jusqu'à leur humble appartement. page 158

Xiao Fei arriva à la conclusion que toutes les conditions avaient été réunies pour qu'il soit heureux et qu'il ne s'était pas rendu compte, qu'au lieu de travailler à la recherche du beau et du vrai, il avait perdu son temps. Il avait attendu le bonheur comme il attendait maintenant une intervention divine. Il avait confondu plaisir et bonheur . page 217



lundi, août 08, 2022

FABLE D'AMOUR. ( Antonio MORESCO )

 "Fable d'Amour" écrit Moresco, raconte une histoire d 'amour entre deux personnages qu'il serait impossible 'imaginer plus éloignés: un vieux clochard qui ne se souvient plus de rien et qui a pratiquement perdu la raison, et une fille merveilleuse. C'est l'histoire d'une ces rencontres qu'on croit impossibles mais qui peuvent avoir lieu dans les territoires libres et absolus de la fable, et aussi, quelquefois dans la vie. "  Fût-il le plus pur, l'amour a-t-il la vocation à durer? Puisque l'amour est sans pourquoi, doit-on chercher plus d'explication à ce qu'il tue qu'à celui qui l'a fait naître? Et si la fable était l seul mode pour raconter aujourd'hui la puissance d'aimer? 

dimanche, août 07, 2022

LA PARENTHESE BOOMERS ( François DE CLOSETS) 2022

 Entre 1970 et 2020, la France n'a connu ni guerre, ni crise majeure: une parenthèse unique dans son histoire. Pourtant, pendant cette période, les boomers aux commandes du pays, l'ont fait passer de la prospérité au déclin. Cette génération égoïste n'a pensé qu'à ses propres intérêts, sans considération pour l'avenir. Et au moment où la démographie se rappelle à nous, le tragique de l'Histoire fait son grand retour. La parenthèse enchantée est désormais fermée, nous voilà au bord du précipice. François De Closets n'a cessé de condamner dans ses livres à succès la démagogie et la procrastination. A 88 ans, rejoignant l'indignation des jeunes générations, il retrace sans concession la faillite des boomers, qui laissent à la charge de leurs enfants une société de vieillissement submergée par la dette et la dépendance. Une irresponsabilité reposant sur le dévoiement de l'idée de liberté, passée de celle du " nous tous ensemble" au service du bien commun à celle du "moi d'abord" au service des égoïsmes individuels. Pour réconcilier les générations, ils nous faut de toute urgence refonder une liberté collective.  Face aux immenses enjeux, des solutions existent qui ne ruineront pas le pays, n'accableront pas les plus jeunes, ne conduiront pas à l'abandon des plus âgés. Par des propositions comme le Conseil de prévision, ce livre apporte, très concrètement, la preuve. Pour que le désastre en cours se transforme en chemin de renouveau. 

La démographie se révèle beaucoup plus exigeante que l'économie et va nous imposer des réformes radicales, véritablement révolutionnaires.....Un système  de solidarité intergénérationnelle conçu pour la France de 1946 ne peut convenir à la France  de 1950. page 18

Les naissances qui, en France, ne dépassaient guère 600 000 par an, bondirent à plus de 840 000 en 1946 et phénomène plus surprenant, se maintinrent  au-dessus de 800 000 jusqu'en 1975. page 23

Ceux qui eurent le pouvoir entre 945 et 1975 portaient encore en eux le souvenir de la guerre, de l'Occupation et de la Reconstruction, tandis que ceux qui s'étaient défoulés en 1968 avant de se précipiter sur les places comme des pillards sur les palais impériaux,  n'avaient pas connu la guerre, ni le chômage ni la misère. Leurs  parents étaient passés de la pauvreté au confort moderne, et à la grande remise en cause de la société de consommation. Il est de plus grandes souffrances. page 31