dimanche, décembre 30, 2012

L'OMBRE DU VENT (Carlos Ruiz Zafon)

"Dans la Barcelone de l'après-guerre civile, marquée par la défaite, la vie difficile, les privations, les haines rôdent toujours.Ce roman avec un tableau historique évoque les émois de l'adolescence où les mystères s'emboîtent comme des poupées russes. L'auteur mêle inextricablement la littérature et la vie."
"j"ai grandi entre les livres faisant des amis invisibles dans les pages qui tombaient en poussière et dont je porte  encore l'odeur  sur mes mains".

La ferveur enfantine  est une maîtrise infidèle et capricieuse...puis les anfants grandissent et on ne sait plus ce qu'ils pensent ni ce qu'ils éprouvent. Ainsi va la vie. Les gens caquettent à qui mieux mieux. L'homme ne descend pas du singe, il descend  de la poule" page 141

"Les raisons qui poussent à dire la véritésont limitées mais le  nombre  de celles qui poussent à mentir est infini."

"Méchants, non , rectifia Firmin. Imbéciles, ce n'est pas la même chose. La méchanceté suppose une détermination morale, une intention et une certaine réflexion. L'imbécile ou la brute, ne s'attarde pas à réfléchir ou à raisonner. IL agit par instinct, comme un boeuf de labour, convaincu qu'il fait le bien, qu'il a toujours raison, et fier d'emmerder tout ce qu'il voit différent de lui, que ce soit par la couleur, la croyance, la langue, la nationalité, la manière de se distraire. En fait, le monde aurait besoin de plus de gens vraiment méchants et de moins de simples crétins" page 173

"Béa dit que l'art de lire est en train de mourir lentement, que c'est un rituel intime et que le livre  est un miroir et que nous pouvons seulement y trouver ce que nous portone  déjà en  nous, que nous mettons dans la lecture l'esprit et l'âme et que ce sont des choses chaque jour plus rares."

"Il disait souvent que nous existons tant que quelqu'un se souvient de nous" page 191

"Le vin fait du sage un idiot et de l'idiot un sage" page 388

samedi, décembre 22, 2012

UN FUSIL DANS LA MAIN, UN POEME DANS LA POCHE ( Emmanuel Dongala)

Ce livre est un récit des Indépendances de l'Afrique, à travers le personnage de Mayéla dia Mayéla. De la lutte intellectuelle puis armée dans les maquis d'Afrique Australe, jusqu'au sommet du pouvoir, Mayéla incarne le rêve d'un continent libéré du colonialisme . En réalité, le continent n'aura fait que changer de maître, remplaçant le colon Blanc par le despote Noir.

'Un officier blanc à un Noir " Comprenez bien ceci: Dieu nous a faits tous différents et il veut que nous restions séparés. Dieu a envoyé l'Africaner en Afrique pour une mission civilisatrice et sa tâche divine est de contrôler tout ce qui se passe dans ce pays. Et grâce à lui, ils bâtiront une nouvelle civilisation de races pures, le Blanc restera blanc, le Bantu bantu, c'est pour votre bien aussi. N'oubliez jamais cela. page  68

L'histoire n'est pas une série de faits ou d'événements résumés par une date. Bien au contraire, l'histoire est mouvement; mouvements d'hommes, d'idées, de pensées qui se contredisent, s'annulent ou s'ajoutent. Page 238

mercredi, décembre 19, 2012

MAUDITE EDUCATION (Victor Gary)

"Le président éternel , qu'on dit être aussi méchant, aussi inhumain,- rappelle-toi qu'il a fait fusiller  dix-neuf officiers - n'est que le miroir qui reflète la bêtise, la violence, le mépris de la personne humaine qu'on cultive tant dans notre société. Il est la quintessence de ce que, malheureusement,  nous sommes notre être véritable, notre pur produit." page 67

"Je persiste à croire que ce  qui est rêve se confond avec le passé. Le présent, lui-même, n'est qu'un espace incertain à peine palpable, déjà évaporé alors qu'on a même pas profité de ce qu'il offre. L'homme n'a que ses souvenirs et le rêve est le cadre qui amplifie les perspectives, donne plus de luminosité à la mémoire. Le rêve surtout n'appartient qu'au rêveur. Tandis que nous ne sommes pas les propriétaires de nos souvenirs car ils ont été construits avec d'autres que nous, qui peuvent avoir sur nos réminiscences des opinions et des sentiments. page 128.

"Je n'ai aucune fierté d'être Haïtien. mais je voudrais me battre pour l'être, pour que   mes enfants le soient aussi. C'est ce que je fais avec mes mots."

"Aujourd'hui encore, je constate le fossé qui se creuse entre nous et nos enfants. Sans qu'on se rende compte, ces derniers créent , à notre insu, leur univers, vivent leurs propres expériences et n'en partagent avec nous, qu'une infime partie."

"Etre ici est si pénible
Que je peins sur une cité
La mer de la mer refuge.
Dans le bleu  de la mer refuge,
Je rêve d'attraper l'éclipse
Pour y accrocher une conscience écorchée.
L'enfer n'existe que sur terre, petit.
On n'échappe pas à nos petitesses, à nos folies, à nos traîtrises et à nos crimes"

dimanche, décembre 09, 2012

OMBRES CHINOISES (Lisa SEE)

Roman paru en mai 2012 qui décrit avec minutie et réalisme les années 1957 à 1959 en Chine. C'est le Grand Bond en avant. Exit les propriétaires terriens, la cuisine familiale; tout se vit ensemble. C'est l'idéal révolutionnaire qui électrise les gens, que se soit à la campagne ou à la ville. Tout le monde veut réaliser les voeux souhaités par Mao.
Arrive le moment où la pénurie survient. On a voulu faire fi des cultures traditionnelles pour semer du blé etc...mais c'est l'échec. La cantine collective se ferme, les familles  cherchent à survivre: rats, oiseaux, racines, écorce, herbes, terre, on glane des grains de riz dans les champs etc...
On arrive à manger de la chair humaine. Des cadavres nombreux dans les maisons, les champs, le long des routes mais au sommet, on se tait sur ce désastre. En ville, à Shanghaï, on survit également. Tout est rationné.

May , l'héroïne , venue de Californie par idéal révolutionnaire, déchante et se rend compte que ce dont elle avait rêvé n'est qu'un leurre, son mariage est un échec, sa fille se révèle le seul motif de rester en vie et rentrera en Amérique après bien des déceptions et des difficultés.

J'ai été très intéressée par ce roman car il décrit une page de l'histoire de la Chine aussi bien à la campagne qu'à la ville. L'auteur a interrogé des personnes qui lui ont raconté leur histoire. La famine dura 3 ans. Cependant, peu d'études ont été faites concernant le Grand Bond en avant. Ceux qui le subirent dans les campagnes les pires effets de la famine sont morts sans pouvoir en témoigner ou sont restés isolés dans leurs villages.

lundi, décembre 03, 2012

POUR TOUT L'OR DU BRESIL ( Jean-Paul Delfino)

Novembre 1755, un tremblement de terre ravage Lisbonne, la capitale du Portugal. pour reconstruire la ville, le premier ministre du roi fait appel à Dom Cristiana de Fonseca, jeune fils d'un commerçant lisboète. Au même moment, Zumbo, fils d'esclaves, quitte Rio pour aller faire fortune dans la quête des diamants et de l'or à Ouro Preto, au Brésil.

Tout le roman s'étire sur une quarantaine d'années entre le Portugal et le Brésil. Les idées des philosophes français sont les bienvenues chez certains et honnies par d'autres. Une page d'histoire du Portugal et du Brésil qui avait des désirs d'indépendance.

Après le tremblement de terre, l'Eglise dit qu'il est une punition de Dieu; "Pour eux (les prêtres) Lisbonne était devenue la Sodome baroque". L'Eglise veut reconstruire d'abord les églises, les couvents etc..
"L'être humain ne saurait se nourrir que de  prières. Il lui faut manger et boire, se vêtir, trouver à se reloger, recommencer à travailler. Il lui faut pouvoir se soigner, se chauffer, apprendre dans les universités, pouvoir se déplacer à nouveau pour que l'économie reprenne et que Lisbonne renaisse de ses cendres. "page 44

"Notre Christ à nous , les  nègres, c'est Oxala. Il  n'a jamais été crucifié mais, pour que l'Inquisition nous fiche la paix, on l'a mis sur une croix. Il n'est pas blanc, il est métis et, autour de son cou, on a accroché un petit collier de cauris béni par Notre Mère-de-saint. Si tu regardes de près son visage, tu verras aussi des traces de scarification des tribus bantoues. Celle que les catholiques appellent la Vierge Marie, c'est Iemanja, la déesse des eaux  et de la fertilité. Le bois dans lequel elle a été taillée est très sombre et c'est pourquoi on l'appelle la Vierge noire...ça arrange tout le monde, les Africains n'oublient pas d'où ils viennent et ils se rappellent leur culture. Quant aux curés, ils croient qu'on honore les saints chrétiens sinon ils nous feraient danser au bout d'une corde." pages 144, 145

"Est-ce-qu'on a jamais vu  un Noir avoir de l'instruction, foutre Dieu?
-Attention, c'est pas parce que t'es un Nègre que tu pourrais pas être un savant comme un Blanc. C'est parce que t'es un miséreux, un pauvre. Contre ça l'instruction n'y peut grand-chose, crois-moi" (Zumbi a appris à lire et à écrire ) page 190

Zumbi est devenu riche. "Maintenant qu'il est riche, il mange avec des bourgeois et même des nobles..Un Nègre qu'a des sous,ça reste un Nègre. Et on le respecte encore moins qu'un Nègre pauvre, par jalousie." page 235

"Tu étais beau parce que tu étais libre. Avec ta perruque sur la tête et tes brodequins, tu as l'air riche, mais tu es prisonnier " Laurinda à Zumbi; Laurinda est sa femme.page 237

"Les colonies sont un mal nécessaire pour la bonne fortune du Portugal" page 239

"Un homme a le droit de réussir sa vie quelle que soit sa couleur de peau. "page 244





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lundi, novembre 26, 2012

LE FEU DE SHIVA (Suzanne Fisher Staples)

Un autre livre sur l'Inde, bien plus court que le précédent.

Un jour où un cyclone dévaste un village au sud de l'Inde, naît une petite fille, Parvati.Elle grandit entourée de l'hostilité des villageois  persuadés qu'elle a des pouvoirs surnaturels. Les pas de danse de la fillette semblent provoquer des événements étranges. Seule, sa mère ; croit en elle. Parvati n'a qu'un rêve: danser comme le dieu Shiva. Un grand maître de danse indienne découvre ses talents et l'invite à Madras où elle se soumet à un programme rigoureux  d'étude et de discipline. Une  rencontre avec un jeune homme exceptionnel va faire basculer sa vie.

Parvati doit affronter les superstitions, les inégalités sociales, les préjugés pour parvenir à ses rêves.

mercredi, novembre 21, 2012

DES LANTERNES A LEURS CORNES ATTACHEES ( Radhika JHA)

L'héroïne originale et symbolique de ce roman est une vache. Une  vache surgit de la forêt et c'est le début d'une grande histoire qui va faire de l'humble Ramu et de sa femme Lakshmi les sauveurs de leur village. Jusque là, leur village de Nandgaon vivait à l'écart du monde, dans une sorte de paradis préservé: pas de route, le chef du village prenait seul les décisions  et tout le monde se remettait à lui pour sa vie privée, de travail etc...
A l'insu de tous, Lakshmi fait inséminer la vache venue de la jungle . Tout le village va être bouleversé. Le veau qui naît est bien plus grand et fort que les autres, devenue vache, elle donne bien plus de lait. ramu et son épouse en donne à ceux qui sont dans le besoin et en vendent à l'extérieur. Ainsi; ils peuvent s'offrir une maison avec un toit qui ne fuit pas, une bicyclette etc...Pendant ce temps, les villageois font confiance à leurs dieux, déesses, prêtres, chef du village, craignent la modernité etc..

Manoj propose d'inséminer la vache:
"Que faire sahih s'il est dans notre destin  d'être pauvres? Comme il est dans le vôtre d'être riches.
-Ce n'est pas vrai, je ne suis pas riche.Mais nul n'est destiné à être pauvre.Cela c'était vrai autrefois. Aujourd(hui, il est possible de faire des choses dont on n'aurait même pas rêvé  il y a quelques années....Pourquoi devriez-vous rester pauvres alors que la science pourrait faire de vous des hommes riches? questionna-t-il avec passion. page 110

Patel, (chef du village) finit par dire Keshu,  sans lever les yeux , vous êtes un père pour nous,:vous nous avez donné de la terre pour bâtir nos maisons, des champs où nos femmes peuvent se rendre sans péril pour leur honneur et un lavoir aussi A notre tour, nous avons essayé d'être des fils loyaux. Jamais nous ne vous avons refusé d'accomplir une tâche.Grâce à  nos soins, vos champs ont embelli et vos bêtes se sont multipliées. Nous avons servi vos enfants et leurs familles avec la même dévotion, et nous continuerons à le faire....Jusqu'à présent, nous n'avons jamais eu besoin d'un dieu; c'était vous notre dieu. Aujurd'hui, je vois un homme . page 438

lundi, novembre 12, 2012

TOUT BOUGE AUTOUR DE MOI (D. Laferrière)

Je n'ai pas lu le livre en entier  (le séïsme qui a détruit Port-Au-Prince  en 2010) mais une personne m'a indiqué qqs pages intéressantes. Voici ce que j'ai noté:
La folie
"Les  problèmes de la santé mentale sont au bas de la liste des maladies courantes. De toute façon, la folie n'est pas considérée comme maladie mais comme un mauvais coup du destin. C'est consolant de savoir que dans les pays pauvres, on n'exclut pas les fous. Ils occupent leur fonction de fou avec le droit de faire le fou. Par contre, dans les pays plus fortunés où ils reçoivent des soins particuliers, le fou est mis à part. Il n'a  aucune fonction sociale. Il fait honte , on le cache. Page 161

Le rire et la mort:
Les hommes ne sont pas arrivés à domestiquer la mort. Elle reste tribale, triviale et tripale.C'est la mort qui est à l'origine de la vie, et non le contraire. page 162

Vie collective:
Vivre en groupe exige un tact constant si non ne veut pas bousculer les autres.Les plus pauvres ont une longueur d'avance, ils sont habitués à se frôler constamment et n'ont pas peur de se toucher.Tandis que d'autres éprouvent une réelle répulsion à se frotter à des individus qu'ils jugent d'une classe inférieure. page 175

L'hôpital
Dans ce pays, on ne va  à l'hôpital que quand la douleur devient insoutenable. Autrement, on ne s'estime pas malade. Vaut mieux ne pas être malade si on ne peut s'acheter des médicaments.Ainsi, on passe de la santé à la mort. La maladie est un luxe qu'on ne peut se permettre  sans moyens. Alors, on meurt sans avoir été malade. de mort subite. page 176

dimanche, novembre 11, 2012

POUR SEUL CORTEGE (Laurent Gaudé)

En plein banquet à Babylone, Alexandre Le Grand s'écroule terrassé par la fièvre. Ses généraux se pressent près de lui, redoutant la fin mais préparant la suite, se disputant l'héritage et le privilège d'emporter sa dépouille.

Je suis déçue par ce roman de Gaudé. Après Eldorado, Ouragan, je pensais me plonger dans ce nouveau livre. Suis restée sur ma faim. Ceci est mon impression personnelle.

samedi, novembre 03, 2012

LES DESORIENTES (Amin Maalouf)

Ce nouveau roman de Maalouf parle de son pays natal, des personnes inséparables lors de leur jeunesse  qui se sont dispersés, brouillés et perdus de vue, et qui se retrouvent à l'occasion de la mort   de l'un d'eux. Même si ce récit n'est pas une autobiographie, aucun personnage n'est complètement imaginaire.

" Je suis né sur une planète, pas dans un pays. Si, bien sûr, je suis né aussi dans un pays, dans une famille, dans une maternité, dans un lit...Mais la seule chose importante, pour moi comme pour tous les humains, c'est d'être venu au monde. Au monde! Naître, c'est venir au monde, pas dans tel ou tel pays, pas dans telle ou telle nation."' page 59

De la disparition du passé, on se console facilement; c'est de la disparition de l'avenir qu'on ne se remet pas".page 67

Je ne communique pas mes jugements, je ne suis pas un donneur de leçons, l'observation du monde ne suscite chez moi qu'un dialogue intérieur, un interminable dialogue avec moi-même" page72

Le téléphone est insidieux et trompeur. Il installe entre les interlocuteurs une fausse proximité; il favorise l'immédiateté et la superficialité; et ce qui est plus grave, il ne laisse aucune trace. page 164

J'ai toujours eu de l'aversion à la fois pour les riches et pour les pauvres. Ma patrie sociale, c'est l'entre-deux. Ni les possédants, ni les revendicateurs. J'appartiens à cette frange médiane qui, n'ayant la myopie des nantis, ni l'aveuglement des affamés, peut se permettre de poser, sur le monde,  un regard lucide. page 171

Une carapace est protectrice autant qu'elle est pesante, on ne peut s'en défaire sans se mettre à nu. page 207

La plupart des hommes traversent la vie, du berceau jusqu'à la tombe, sans jamais prendre le temps de se demander où va le monde et de quoi sera fait l'avenir....Il faut parfois s'élever au-dessus de la vie quotidienne pour se poser les questions essentielles. page 257

La religion, c'est important mais pas plus que la famille, pas plus que l'amitié, et pas plus que la loyauté. Il y a de plus en plus de gens pour qui la religion dépasse la morale. Ils te parlent du licite, de l'illicite, du pur, de l'impur, avec des citations à l'appui. Moi, j'aimerais qu'on se préoccupe plutôt de ce qui est honnête, et de ce qui est décent. Parce qu'ils ont une religion, ils se croient dispensés d'une morale. page 270

J'ai lu ce témoignage d'un ambassadeur israëlien, dans les années cinquante et  soixante: "Notre mission était devenue délicate, parce qu'il nous fallait persuader les Arabes qu'Israël était invincible, et persuader l'Occident qu'Israël était en danger de mort" Avec le recul, on peut dire que ce diplomate et ses collègues ont remarquablement réussi dans cette mission contradictoire Il ne faut s'étonner , dès lors, que les Occidentaux et les Arabes ne posent pas le même regard sur l'état d'Israël, ni sur l'itinéraire du peuple juif. Page 294

Il y a des moments où l'on a besoin d'être complètement seul avec ses propres délibérations intimes, et où la moindre intervention est ressentie comme une agression. Page 324

Un minoritaire a envie de taire sa différence plutôt que de la mettre en lumière ou de la porter en étendard. Il ne se dévoile que poussé dans ses retranchements - ce qui d'ailleurs finit par se produire. Page 400

Les évangiles contiennent tant d'éléments qui , aux yeux de l'historien sceptique que je suis, sont trop convenus pour être vrais. Selon l'esprit du temps, il fallait que les Apôtres soient douze - comme les douze mois de l'année, comme les douze tribus d'Israël, comme les douze dieux de l'Olympe; et que Jésus meurt à trente - trois ans - l'âge emblématique auquel était mort Alexandre. Il fallait qu'il  n'ait ni frère ni soeur, ni femme, ni enfant, et qu'il soit né d'une vierge.  Bien des épisodes sont manifestement embellis, et peut-être empruntés à des légendes antérieures afin que le mythe soit conforme aux attentes des fidèles....Pour moi, ... la grandeur du christianisme, c'est qu'il vénère un homme faible, bafoué, persécuté, supplicié, qui a refusé de lapider la femme adultère, qui a fait l'éloge du samaritain hérétique et qui n'était pas sûr de la miséricorde du ciel. ( à propos de Eli, Eli , lama shabaqtani"page 402

On parle souvent de l'enchantement des livres. On ne dit pas assez qu'il est double. Il y a l'enchantement de les lire et il y a celui d'en parler. Page 454

C'est l'Occident qui est croyant jusque dans sa laïcité, et c'est l'Occident qui est religieux , jusque dans l' athéïsme. Ici, au Levant, on ne se préoccupe pas des croyances, mais des appartenances.  Nos confessions sont des tribus, notre zèle religieux est une forme de nationalisme. Page 501




dimanche, octobre 14, 2012

VINGT-QUATRE HEURES DE LA VIE D'UNE FEMME ( Stefan Zweig)

J'ai voulu lire quelque chose d'assez court après le premier tome de "Quatre générations sous le même toit".
Ce livre est le récit d'une passion foudroyante entre une dame anglaise "comme il faut" et un jeune inconnu rencontré dans un casino. Roman court et bien enlevé.

vendredi, octobre 12, 2012

QUATRE GENERATIONS SOUS LE MEME TOIT(Tomes 1, 2, 3 ) Lao She)

Le rat est un animal rusé qui est craint des hommes mais qui fuit devant eux. page 112

Un homme qui se connaît bien  est nécessairement modeste. page 313

La faiblesse d'une personne de marque est souvent plus enviée que la bonne santé du pauvre.  page 345

L'argent, pour les personnes âgées , c'est tout le contraire des maladies, on ne veut en parler à personne. page 405

Le ciel ne s'éclaircit pas tant que le tonnerre se fait entendre.

Tant qu'on ose se battre, même si on essuie des échecs, on est digne de confiance.

La civiliation est fragile comme une fleur: plus elle est belle et plus elle attire les doigts cruels qui coupent sa tige et lui donneront sa mort.

Ce n'est pas la force qui fait le mérite d 'une nation mais son intelligence.

Le coeur d'une mère est le thermomêtre des sentiments de ses enfants.

La vie est une oeuvre que l'on crée à chaque instant.

Nous autres, les  vieux, nous n'avons pas à demander pardon pour ce que nous sommes. Nous pouvons seulement expliquer pourquoi nous sommes ainsi.

Lorsque l'oiseau est dans sa cage, une bonne fois pour toutes, à quoi bon ne plus vouloir chanter?


Trois tomes constituent ce récit de Lao She.



samedi, septembre 29, 2012

DANS LA GORGE DU DRAGON ( Eliot Patterson)

Excellent polar.

Ce livre nous fait rentrer dans le monde tibétain avec ses croyaances, ses moines, sa philosophie et ses coutumes.
Il nous fait vivre la souffrance du peuple tibétain face à la barbarie de l'occupant chinois. Shan, ancien inspecteur de police est emprisonné dans un camp de rééducation chinoise pour avoir mis le nez dans les affaires du Parti. Il casse des cailloux à la 404è brigade quand un cadavre décapité est découvert sur les flancs de la montagne qui surplombe le camp.Shan doit mener l'enquête. Pour sauver ses codétenus tibétains de l'exécution, il n'a d'autre choix que de pénétrer au coeur de la barbarie chinoise, jusqu'à l'antre du Dragon....

"Il fallait toujours aller de l'avant, plus loin que l'endroit où on se trouve" page 232

"Sur les murs , était accrochée une affiche aux couleurs passées représentant de  jeunes gardes rouges dressant fièrement le poing .Démolir les quatre Anciens proclamait la légende. Les Quatre Anciens  étaient l'idéologie, la culture, les habitudes et les coutumes. Pendant la Révolution Culturelle, les gardes rouges avaient envahi les foyers de minorités et détruit tous les vêtements traditionnels -souvent des objets hérités de génération en génération- et brûlé le mobilier, allant même jusqu'à couper les tresses des femmes." page 328

Un prêtre m'a dit  que , quand une âme est mûre, elle se contente de tomber de l'arbre, comme une pomme. page 373

La Phrase de Lao Tseu :" savoir que l'on ne sait pas est la meilleure des choses". page 424

jeudi, août 30, 2012

LES MAIA (Eça De Queiroz)

Roman paru en 1888est dit-on le chef d'oeuvre de Eça De Queiroz (1845-1900) C'est le seul livre dans la littérature portugaise qui suit non seulement le destin d'une personne mais aussi d'une famille.
Peinture d'une société bourgeoise décadente qui s'ouvre vers les idées du XIXè de l'Europe.

samedi, août 18, 2012

LE VICE-ROI DE OUIDAH (Bruce Chatwin)

Le Vice-Roi de Ouidah s'inspire de l'histoire vraie, extraordinaire et picaresque, de Francisco Manuel, d'abord au Brésil puis au Dahomey, de sa jeunesse à l'âge adulte, de ses rapports avec le roi du Dahomey qui le fait riche - puis le jette en prison. Sauvé par le demi-frère du roi,  Francisco le remercie en le hissant sur le trône et le nouveau roi accorde à l'apatride le monopole du commerce des esclaves. Francisco multiplie femme et maîtresses, les enfants et va jusqu'à créer au Dahomey  une espèce de petit Brésil, où il accueille les esclaves libérés qui , du Brésil, reviennent au pays natal...Il importe donc ceux-là même qu'il a déportés!
Ce livre de Chatwin souligne la terrible ambiguïté du commerce des esclaves et rend cet ouvrage passionnant.

"Il était (Francisco ) arrivé de San Salvador de Bahia en 1812 , et pendant plus de trente ans, fut le "meilleur ami" du roi du Dahomey, l'approvisionnant régulièrement en rhum, en tabac, en parures, en fusils Long Dane (qui en dépit de leur appellation, n'étaient pas fabriqués au Danemark mais à Birmingham). En échange, il put profiter  du titre de Vice-Roi de Ouidah, du monopole de vente des esclaves, d'une cave de chateau-margaux et d'un inépuisable sérail de femmes.A sa mort , en, 1857, il laissa soixante-trois fils mulâtres et une quantité inconnue de filles. pages 16, 17

La vie des Da Silva (descendants de Francisco) les plus âgés, était vide et triste. Ils regrettaient la traite des Noirs, âge d'or où leur famille était riche, célèbre et blanche. page 18

En 1887, Cândido Da Silva, le plus jeune fils de Dom Francisco , fut élu chef de famille pour l'habilité qu'il montrait  à rétablir la fortune des Da Silva. Il obtint même que le roi du Dahomey signe de sa croix un document qui faisait de Ouidah un protectorat portugais. page 57

Da Silva rêvait toujours de Bahia...et écrivait des lettres à Joaquim Coutinho...Il implorait des nouvelles, pour empêcher ses souvenirs de s'estomper; mais les réponses de Joaquim étaient invariablement froides et commerciales: "Par notre brick Legitimo Africano, j'ai reçu ce jour ton chargement de 230 articles(des esclaves)...Je déplore la perte d'un tiers due à une épidémie de dysenterie. Les femmes résistent beaucoup mieux que les hommes et j'aimerais connaître ton opinion à ce sujet." page 134

Aucun capitaine ne pouvait échapper aux garde-côtes. Aucun ne pouvait embarquer un esclave sans payer une taxe d'exportation ou débarquer une balle de coton sans acquitter un droit.page 163

En 1838, la traite des nègres n'était plus une profession pour un gentleman brésilien....Voilà dix ans que c'était devenu un délit criminel. Pourtant le commerce des esclaves prospérait  sans qu'aucune poursuite ne soit engagée et les planteurs de café du Sud réclamaient des esclaves à cor et à cri, mais le nouveau commerce était tombé aux mains de riches portugais que leurs méthodes commerciales rendaient particulièrement impopulaires.Les Brésiliens libéraux détestaient l'esclavage pour des raisons morales et les conservateurs s'en méfiaient pour des raisons pratiques: il y avait trop de Noirs au Brésil. page 177

Les premiers "Brésiliens" de Ouidah furent une cargaison d'anciens esclaves  qui avaient acheté leur liberté  et nolisé un navire de commerce anglais pour les ramener en Afrique....Les " Brésiliens" firent de Ouidah un petit Brésil . Chaque samedi, Dom Francesco recevait à dîner les chefs de la colonie.Page 190, 191

dimanche, août 12, 2012

PHOTOGRAPHIES ET CARNETS DE VOYAGES (Bruce Chatwin)

Je reviens à l'un de mes auteurs préférés.

"Longtemps avant qu'il ait publié le moindre texte -peut-être même longtemps avant qu'il ait pensé à devenir écrivain- Chatwin  avait commencé à travailler sur son "livre nomade". "Il faut que j'écrive ce satané bouquin d'une façon claire et raisonnable. J'ai ouvert la première page cet après-midi un epu comme quelqu'un qui dépose une lettre piégée. C'était horrible. Prétentieux. Mais j'aime toujours : " Les meilleurs voyageurs sont illettrés; ils ne nous ennuient pas avec leurs réminiscences".

LE VOYAGE DANS LE PASSE (Stefan Zweig)

C'est la première fois que je lis un écrit de cet  écrivain né en Autriche en 1881 et mort au Brésil en 1942 après avoir fui le nazisme.
LE VOYAGE DANS LE PASSE, nouvelle d'une centaine de pages, raconte l'histoire des retrouvailles au goût amer entre un homme et une femme qui se sont aimés et qui croient s'aimer encore. La femme n'est jamais nommée par son prénom....

(Louis, le personnage principal est rentré du Mexique , après 9 ans d'absence, il y a fait fortune et est dans le train avec "la femme" pour Heidelberg.) " Le train se mit en branle en cahotant. Le cliquetis des roues étouffait la conversation avocassière (des passagers dans le compartiment) et la réduisait à un simple bruit de fond. Mais, ensuite, heurts et à-coups se muèrent peu à peu en un balancement régulier, le berceau d'acier tanguait, incitant à la rêverie. Et tandis qu'au-dessous d'eux, les roues crépitantes filaient, invisibles, vers un avenir que chacun meublait à sa guise, leurs pensées à  tous deux voguaient  vers le passé comme vers un songe." page 14

(Louis a longtemps vécu dans la pauvreté) "Il avait grandi comme précepteur dans les maisons de riches parvenus, qui le blessaient;  statut hybride sans qualité, à mi-chemin entre le serviteur et le familier, chez lui sans y être, simple ornement comme les magnolias qu'on disposait puis dont on se débarrassait après usage, il avait l'âme pleine de haine contre les puissants et le milieu dans lequel ils évoluaient, les meubles lourds et imposants, les chambres cossues, les repas abondants, toute cette richesse à laquelle on tolérait qu'il prît part" Page 18

(Son patron l'appelle pour devenir son secrétaire particulier ; il arrive dans cette maison où il va vivre un ou deux ans) "Des tapis profonds l'attendaient, qui absorbaient ses pas, des tapisseries des Gobelins, dès l'antichambre, tendues sur tous les murs et qui réclamaient  des regards solennels, des portes sculptées aux lourdes poignées en bronze, qui, à l'évidence, n'étaient pas faites pour être ouvertes à la main, mais que devaient actionner des serviteurs zélés à l'échine courbée: autant de choses qui, abrutissantes et hostiles, accablaient son amertume orgueilleuse...Il fut submergé par le sentiment d'être un intrus qui n'avait rien à faire là...Page 21

(Son patron lui donne l'opportunité d'aller au Mexique pour extraire un minerai)  "Comment une telle offre , lui tombant soudain d'un ciel serein, n'aurait-elle pas tourné la tête d'un ambitieux? Elle était là, enfin, la porte, comme arrachée par une explosion, qui devait l'affranchir de la pauvreté où il croupissait, du monde sans lumière de la servitude et de l'obéissance, de l'éternelle échine courbée de l'homme contraint d'agir et de penser avec modestie:  vorace, il scrutait les papiers, les télégrammes, où, à partir de signes hiéroglyphiques, son vaste plan, dans des contours larges et flous , prenait peu à peu forme.  Soudain, des chiffres s'abattirent sur lui à grand fracas, des milliers, des centaines de milliers, des millions à administrer, à compter, à gagner, atmosphère incandescente du pouvoir dominateur, où, abasourdi et le coeur battant, il s'élevait soudain, comme un ballon magique, depuis la sphère vile et étouffante où il vivait. Et au-delà de ça: il n'y avait pas que l'argent, les affaires, le goût du risque et des responsabilités. page 32, 33

(La guerre 14-18 est déclarée , impossible de retourner en Europe et de recevoir du courrier de "la femme" et de lui en expédier.) " La firme lui confia pour mission de rendre  l'entreprise autonome, et de la diriger comme une compagnie mexicaine...Cela tendait toutes ses forces, faisait bourdonner la moindre de ses pensées. Il travaillait douze  heures, quatorze heures par jour avec un acharnement  fanatique pour ensuite, le soir,  assommé par cette avalanche de chiffres, trop épuisé pour rêver, et inconscient , s'écrouler sur son lit".page 58

"Mais , arriva un jour, jour mugissant de carillons lancés à pleine volée, où les câbles télégraphiques frémirent et où, dans toutes les rues de la ville en même temps, des hurlements, des grosses lettres comme le poing, proclamèrent la nouvelle tant attendue de la conclusion de la paix.."page 61

"Et s'ils s'embrassaient, ce n'était que du regard."

Séparés, elle irradiait depuis une autre sphère où le désir n'a pas de mise, pure, immaculée et même le plus passionné de ses rêves n'avait pas la hardiesse de la dévêtir".

"Te souviens-tu  de ce que tu m'as promis...lorsque je reviendrais...?
Ses épaules tremblaient. "Laisse cela, Louis...ce sont de vieilles histoires, n'y touchons pas. Ce temps-là, où est-il?
-Il est en nous, ce temps-là", répondit-il inflexible, dans notre volonté" page 79

"Dans le vieux parc solitaire et glacé,
Deux spectres cherchent le passé." page 100

mardi, août 07, 2012

PHOTOGRAPHIES ET CARNETS DE VOYAGE (Bruce Chatwin)

Je reviens à l'un de mes auteurs préférés.

"Les meilleurs voyageurs sont illettrés.; ils ne nous ennuient pas avec des réminiscences " page 13

Il concevait le voyage comme une fin en soi, comme une réalisation de l'idée de fuite et d'évasion, mais une évasion hors de rien en particulier et une fuite vers presque tout, un parcours circulaire autour de la terre qui doit se terminer là où il a débuté pour recommencer de nouveau.... Chatwin était un être multiple et il avait en conséquence de nombreux amis très différents entre eux....La grande qualité de ses livres (qui a été reconnu dans le monde entier) et sa mort comparativement précoce, qui nous a privé d'autres oeuvres qu'on peut imaginer plus belles, ont créé une légende, voire un culte. page 13

"Raconter des histoires est la seule occupation concevable pour un être aussi minable que moi."



mardi, juillet 31, 2012

CE QU'IL ADVINT DU SAUVAGE BLANC ( François Gardee)

"Au milieu du XIXè siècle, Narcisse Pelletier, un jeune matelot français, est abandonné sur une plage d'Australie. Dix-sept ans plus tard, un navire anglais le retrouve par hasard: il vit nu, tatoué, sait chasser et pêcher à la manière de la tribu qui l'a recueilli.. Il a perdu l'usage de la langue française et oublié son nom.
Que s'est-il passé pendant ces 17 années? C'est l'énigme à laquelle se heurte Octave de Vallombrun, l'homme providentiel qui  recueille à Sydney celui qu'on surnomme désormais "le sauvage blanc".


Ce récit est tiré d'une histoire vraie. C'est une réflexion sur l'altérité et sur le complexe de supériorité culturelle.

Quand il parvint au sommet de la petite falaise, il découvrit qu'il était seul. La chaloupe n'était plus tirée sur la plage, ne nageait pas sur les eaux turquoise. La goélette n'était plus au mouillage  à l'entrée de la baie, aucune voile n'apparaissait même à l'horizon. Il ferma les yeux, secoua la tête. Rien n'y fit. Ils étaient partis. Page 9

Alors, il découvrit qu'il était seul. Il poussa un hurlement , qu'aucun navire ne pouvait entendre...Page 11

( Octave de Vallombrun a recueilli Narcisse et est en réunion dans le bureau du gouverneur anglais à Sydney)."Je n'écoutai pas les bavardages des autres participants, qui se félicitaient de ce que aucun  de leurs compatriotes (anglais) n'ait atteint ce degré d'abaissement, et qu'il fallait  décidément  être français pour tomber aussi bas" page 40

Les progrès de Narcisse m'apprennent  d'autres choses, que je ressens confusément  et ne parviens pas à mettre en ordre. Peut-être ne saurais-je jamais rien de ces nègres australiens- mais ce que j'entrevois à travers le parcours de Narcisse est porteur d'enseignements d'une autre nature, et qui ne me semblent pas moins importants...Narcisse ne parvient pas  à écrire, ni à penser le futur, ni à raconter son séjour. Je croyais au début  que son esprit  n'était qu'une page blanche sur laquelle mes leçons allaient se graver, ou une cire molle sur laquelle j'imprimerai ma marque  page105

Il faudrait reconnaître comme civilisées les coutumes barbares que Narcisse révèle chaque instant?   Cela ne se peut. page 110

Je regarde Narcisse qui regarde la mer. (en route vers la Grande Bretagne) Quatre mois déjà que nous passons toutes nos journées, ensemble le sauvage blanc, muet, effrayant, apeuré, est devenu ce compagnon de voyage souriant et réservé qui n'attire pas l'attention et moi, ai-je  été transformé par cette aventure? Les observations que je fais, minent leurs certitudes. Qu'est-ce qu'un sauvage? et si Narcisse était devenu complètement sauvage, quel jour et à quelle heure est-il redevenu civilisé ? page 134

La Société de Géographie a procédé, à ma demande, à une  recension de tous les cas connus . Aucun n'est resté dix-huit ans  dans une solitude absolue.Aucun pour tout dire n'a ainsi adopté entièrement les moeurs et la langue  des sauvages. Le cas d'un jeune homme blanc, devenu complètement  sauvage, oubliant entièrement ses origines, semble sans exemple. ...On connaît, à l'inverse,  des sauvages amenés en Europe et qui se sont adaptés à notre mode de vie...Ainsi, le sauvage vivant au milieu des Blancs adopte nos usages, alors que le Blanc précipité  parmi eux conserve les bienfaits de la civilisation, des années durant - à la seule exception connue et pour cela fascinante de Narcisse. Peut-on mieux démonter la supériorité du Blanc sur le sauvage? La force d'attraction ainsi mise en valeur, et qui s'exerce toujours dans le même sens, confirme xe que le bon sens suggère. A l'exception de Narcisse. page 233

Narcisse -est employé au Service des Phares- ne fait que reproduire le savoir appris des sauvages, me direz-vous? Certes. Mais il y a donc  un savoir des sauvages? Quel est-il?  Quels autres trésors contient-il? page 254

Dialogue entre De Vallombrun et Narcisse: "Tu étais seul sur la plage..le navire était parti et tu ne savais pas s'il reviendrait...
- Après...après...ce n'était pas Narcisse., parvint-il à dire dans un souffle.
-Entre les deux, qui  étais-tu?
Il releva son visage , noyé de larmes silencieuses et finit par dire, d'une voix agonisante : " Parler, c'est comme mourir".page 297 ( Narcisse disparaît à jamais après ce dialogue)

"Parler , c'est comme mourir" Parler, c'est parler de l'indicible de ces journée là-bas, c'est raconter , c'est mettre en mots ses souvenirs que je sollicitais sans cesse et à jamais frappés d'interdit.S'il répondait à mes questions, il se mettait dans le danger le plus extrême. Mourir, non pas de mort clinique, mais mourir à lui-même et à tous les autres. Mourir de ne pas pouvoir penser  à la fois ces deux  mondes. Mourir  de ne aps pouvoir être en même temps blanc et sauvage. page 299,300


mardi, juillet 24, 2012

UN SULTAN A PALERME ( Tariq Ali)

Cet écrivain indien raconte l'époque - 1153- où islam, chrétienté, judaïsme cohabitaient en Sicile . Cependant, ce récit explore la période charnière où la tolérance  à l'origine du rayonnement de la Sicile du XIIè siècle, cède la place à la violence entre chrétiens et musulmans..
Le personnage central, Idrisi, cartographe, musulman,  achève sa dernière navigation autour de la Sicile avant d'achever sa Géographie universelle., voulue par le roi chrétien Roger -alias Sultan Rujari., grand protecteur des intellectuels musulmans.

Roman plein de rebondissements politiques, religieux, manipulations etc...Je l'ai trouvé intéressant sur le plan historique.

vendredi, juillet 20, 2012

SOUS L'ETOILE DE LA LIBERTE (Sylvain Tesson)

Petit livre sur les 6000km à travers l'Eurasie sauvage sur les traces des échappés du goulag. S. Tesson  a fait ce rude voyage en 8 mois de mai  à décembre 2003- à la rencontre de survivants du système concentrationnaire, c'est une célébration de l'esprit d'évasion et un hommage à ceux qui choisissaient la liberté au prix du froid, de la faim, de la solitude.
L'auteur a voulu refaire le parcours de Salavomir Rawiez, auteur d'"A Marche Forcée," qui a inspiré le film "Les Chemins de la Liberté" adapté en 2010 par Peter Weir.

"Des centaines d'hommes ont lutté contre le vent, le froid et la faim pour reconquérir leur liberté volée. Des Russes, des Bouriates, des Mongols, des Chinois ont réussi à gagner les Indes  fuyant les totalitarismes qui se répandaient sur l'Eurasie au cours du xxè siècle. Que font les Tibétains qui passent actuellement  l'Himalaya pour échapper à la coercition des Hans? Ils s'enfuient à marche forcée, sur les chemins de la liberté....L'évadé est un homme révolté. Il donne espoir aux oppressés. Il souffre pour eux et endosse le poids d'une responsabilité transcendante: il est chargé de dire au monde entier que l'individu peut triompher des machineries  répressives. La puissance étatique ne peut pas arrêter l'homme en marche". préface

Conversation avec Inagda-Yakoutsk: "Vous n'avez jamais songé à vous évader Inagda? - Moi?  Mais pour s'évader, il faut savoir où aller!" page 38

L'évadé est un sédentaire contraint de passer  par le nomadisme extrême pour reconquérir sa nature. page 63

La yourte exprime l'élan de l'âme. On y résume l'univers: par l'ouverture cerclée au sommet où convergent  les arceaux de charpente, on veille à la bonne marche des étoiles. La colonne de fumée qui s'en échappe figure le pilier du ciel. La tente-astrolabe, orientée sur les points cardinaux, donne un sens à l'espace. A la fois, boussole et phare, nid et foetus, la yourte ne présente aucun angle auquel le cavalier risquerait de se cogner.. Elle est le seule marque de l'homme dans la steppe...La yourte est l'écriture d'un peuple qui n'a transmis ni fondations, ni ruines. Les nomades sont condamnés au mouvement perpétuel. Cette fuite en avant qui est leur malédiction (ou leur nature) ne leur permet pas de laisser quoi que ce soit derrière eux de pierre  ou de bois. pages 64, 65

Avant de partir, je pensais que la solitude serait mon pire ennemi. Je ne la connaissais pas, et c'est une compagne merveilleuse. On devrait l'appeler Félicité.  Elle est le plus beau cadeau que l'on puisse faire à son âme. Elle maintient l'équilibre entre soi-même et le monde extérieur, elle renoue le lien entre l'être et le cosmos. La solitude est un moyen de transport, un infatigable attelage.. Elle fait parfois souffrir. Je me suis surpris à parler tout haut pour la chasser. Je l'ai maudite dans les steppes où ne pousse même pas un arbre pour s'appuyer ou se pendre. Lorsque je sombrais pendant la journée dans une courte et profonde sieste et que, après avoir rêvé des miens et de mes amis, je m'éveillais, seul, dans le néant, environné de vide, la solitude alors étreignait mon coeur. Le reste du temps, elle gonflait mon âme comme le vent se prend dans la voile. page 87

Une évasion ressemble à un couloir de  mort  qui, en définitive,  mènerait à la vie. Page 98


mardi, juillet 17, 2012

LA FEMME SANS SEPULTURE ( Assia Djebar)

"Une Femme sans sépulture , c'est Zoulikha, héroïne oubliée de la guerre d 'Algérie, montée au maquis au printemps 1957 et portée disparue deux ans plus tard, après son arrestation par l'armée française. Femme exceptionnelle, si vivante dans sa réalité de mère, d'amante, d'amie, d'opposante politique, dans son engagement absolu et douloureux, dans sa démarche de liberté qui scelle sa vie depuis l'enfance et qui ne l'a jamais quittée, sa présence irradiante flotte à jamais au-dessus de Césarée."

Pages d'histoire de cette guerre franco-algérienne vues du côté algérien, écrites en français mais très souvent pensées en arabe, ce qui révèle la langue parlée dans ce pays sans compter avec les langues locales. Ce livre ressuscite un destin de femme et empêche l'oubli de ces années qui ont précédé l'indépendance de ce pays.

samedi, juillet 07, 2012

PHOTO DE GROUPE AU BORD DU FLEUVE ( Emmanuel Dongala)

E. Dongala est né en 1941 d'un père cpngolais et d'une mère centrafricaine, il a quitté le Congo au moment de la guerre civile en 1997. Il vit actuellement aux Etats-Unis.
Description décapante des rapports de pouvoir dans une Afrique contemporaine dénuée de tout exotisme.Un groupe de femmes cassent des blocs de pierre dans une carrière au bord d'un fleuve africain. Elles viennent de savoir que la construction d'un  aéroport a fait considérablement augmenter le prix du gravier, et elles ont décidé ensemble que le sac qu'elles cèdent aux intermédiaires coûterait désormais plus cher et que Méréana - le personnage central du roman- serait leur porte-parole dans cette négociation. 
Ces casseuses de cailloux découvrent la force collective et retrouvent l'espoir dans la lutte entre elles et les "acheteurs de cailloux". Attaquées par la troupe, emprisonnées pour certaines, elles font bloc contre le gouvernement et lui tiennent tête. 


dimanche, juillet 01, 2012

LES HEURES SOUTERRAINES (Delphine de Vigan)

J'ai été déçue par ce roman . C'était le premier que je lisais de cet écrivain.

LES SOLIDARITES MYSTERIEURES ( Pascal Quinard)

Pendant mes vacances, ce roman ne m'a pas passionné.

LA LISTE DE MES ENVIES (Grégoire Delacourt)

J'ai lu ce livre mais il ne m'a pas accroché.

LA MER NOIRE (Kéthévane Davrichewy)

Ce livre raconte les souvenirs d'une vieille dame qui a quitté précipitamment la Géorgie en 1919, avec sa famille, pour fuir l'invasion bolchévique dans son pays qui venait de se déclarer indépendant. La vie se refait peu à peu dans l'univers parisien. La communauté géorgienne garde les traditions, rêve de retourner au pays etc....

"Je meurs des mots que personne ne prononce" page 94

"Pourquoi chercher à tout prix à s'intégrer? Nous sommes différents.Je le ressens chaque fois qu'on cherche à me connaître. J'ai presque honte de me présenter. Je ne dis pas que j'ai à rougir de mes origines, mais j'ai peur de la différence. Je le sens, dans leurs yeux, quand nos mères marmonnent des phrases incompréhensibles pour eux, ...quand on n'arrive pas à prononcer mon nom. Cette barrière me laisse sans force".  page 104

samedi, juin 09, 2012

LA, AVAIT DIT BAHI (Sylvain Prudhomme)

Pas de point dans tout le roman , très peu de virgules, pas de majuscule au début des paragraphes...Tout cela un peu déroutant, le passé et le présent se mêlent... Je n'ai pas terminé le livre. 




Au volant d'un camion, sur les routes d'Algérie, Bahi raconte au narrateur ses souvenirs de la ferme où il a travaillé cinquante ans  plus tôt, à la veille de l'indépendance. Il lui décrit l'Algérie d'aujourd'hui, s'amuse des petits bénéfices qu'il fait , à soixante-dix ans, en revendant du sable d'un bout  à l' autre du pays, se moque tendrement de la réussite trop clinquante de ses fils. Des réunions clandestines à deux pas de la ferme aux descentes à la plage, du travail dans les vignes à la folie meurtrière des fêtes de l'Indépendance à Oran, c'est tout un pan du passé qui renaît peu à peu, habité par la figure du fermier Malusci, que Bahi , malgré tout ce qui les séparait, n'a pas oublié."

vendredi, juin 01, 2012

LE GRAND COEUR (Jean-Christophe Rufin)

Rufin nous raconte la vie de Jacques Coeur. Il nous fait revivre ce personnage très contreversé de la fin du Moyen-Age et début Renaissance. C'est à sa femme que l'on doit cet adage "A coeur vaillant, rien d'impossible!".
"Je ne vois pas ma vie de  demain, seulement celle d'aujourd'hui et  surtout d'hier." page 18

Je mesurai très tôt à quel point les qualités humaines recèlent des dangers et combien il est imprudent d'en faire étalage....Talent, réussite, succès font de vous  un ennemi de l'espèce humaine qui, à mesure qu'elle vous admire le plus, se reconnaît moins en vous et préfère vous tenir à distance. page 48

A mon réveil (sa nuit de noces) j'éprouvais une légère amertume, en même temps que le grand soulagement, de savoir que nous serions toujours deux, mais chacun seul. page56

(Jacques Coeur est à Damas) Il était heureux que les croisés n'aient pas réussi à conquérir l'Occident. Et il était nécessaire qu'ils n'y parviennent jamais....Nous (Jacques Coeur et ses compagnons) étions les agents  de l'échange et non de la conquête. Notre vocation était  d'apporter à chacun le meilleur de ce que produisait l'autre.. Nous avions, nous aussi, à notre manière, l'ambition de nous approprier la civilisation des autres  mais en contrepartie de ce  qu'ils pouvaient désirer de la nôtre. La destruction, le pillage, l'asservissement  nous étaient étrangers. page 110

J'avais fait le deuil de mes rêves et je les avais remplacés par des souvenirs; page 112

Pour voir bouger les choses, il faut bouger soi-même page 115

Lui-même, (le roi Charles VII) , tourné vers la ville, voulait acquérir le superflu sans lequel le nécessaire paraissait fade.
 page 228

Il vient toujours  un moment où le rêveur, qui d'ordinaire se croit heureux parce que ses songes l'emportent sans cesse ailleurs, prend conscience de son malheur. page 229

J'aime, moi, le pouvoir tout brut et que rien ne dissimule, celui des rois ou des riches négociants. Cette puissance-là, au moins, dit son nom. Elle se donne pour ce qu'elle est et à chacun revient  de juger ce qu'il compte face à elle. Le pouvoir ecclésiastique avance, lui, sous le masque de l'humilité. Il n'agit ni ne frappe jamais sans invoquer la soumission de celui qui l'exerce à une force supérieure dont il feint d'être l'esclave. En somme, en face d'un religieux, on ne sait  pas à qui l'on a affaire: un maître ou un serviteur, un faible ou un fort. Toutes les affaires, en ces matières, sont incertaines, secrètes, et recèlent des pièges cachés que l'on découvre en sentant ses pas se dérober. pages 339, 340

Ce monde, j'en ai rêvé. Mais la réalité n'a pas la légèreté des rêves. La réussite  de mes projets allait au-delà de tout ce que j'avais pu imaginer et je me sentais enseveli sous ce poids....Tel , j'étais devenu. La liberté et la paix pour lesquelles j'avais oeuvré étaient partout sauf en moi. J'étais envahi, par le désir fou, urgent, d'abandonner cette vie, de jouir paisiblement d'une prospérité suffisante, modeste, de retrouver l'oisiveté et les rêves, l'amour... page 404

Je pensais qu'arrivé l'heure de mon arrestation, mon enthousiasme faiblirait. Il n'en est rien. Curieusement, le souvenir que j'en garde n'est pas mauvais. J'ai même le sentiment très net, aujourd'hui que ma disgrâce a constitué pour moi une nouvelle naissance. page 426

Je suis persuadé que les hommes qui acceptent entièrement les lois existantes peuvent vivre bien, se hisser à de hautes fonctions, triompher des obstacles, mais ils ne produiront rien de grand. page 441

La souffrance et le deuil font rechercher le plaisir quand on peut le connaître à nouveau. En même temps, ils le troublent. Jamais, après de telles expériences, l'esprit ne peut s'abandonner tout à fait à la douceur, au luxe, à l'amour, car, pour en jouir, ces expériences doivent être ressenties comme éternelles. Dès lors que de noirs souvenirs leur fixent des bornes et rappellent  qu'en s'y livrant, on ne fait que retarder le retour inévitable du malheur et de la mort. page 480

Je peux mourir car j'ai vécu. Et j'ai connu la liberté. page 489



mardi, mai 29, 2012

INDIAN KILLER (Sherman Alexie)

"A la fin des années 60, dans une réserve indienne,  une adolescente met au monde un garçon qu'on lui enlève aussitôt. Le nouveau-né est confié à un pilote d'hélicoptère. Destination Seattle , où l'attendent Olivia et Daniel Smith, un couple de parents adoptifs blancs et aisés....Ni Blanc, ni Indien, John Smith grandira, confronté au mystère de sa naissance et au racisme extérieur: en mal de racines, il patauge et sombre dans la folie...."


Pour elle, (Miss Polatkin, étudiante indienne qui harcèle son professeur ) , en effet, être indien se résumait surtout  à une question de survie, et elle s'était à ce point battue pour survivre qu'elle ne savait pas si elle serait capable un jour d'arrêter. Le conflit représentait pour elle une nécessité ( page 75)

John marchait sous une pluie froide et persistante il ne savait pas où il allait, ni comment il était arrivé devant son immeuble, dans Ballard, le quartier scandinave de Seattle.   Les immigrants scandinaves les (arbres)avaient presque tous coupés  depuis le premier jour où ils avaient entrepris de coloniser l'Amérique, les immigrants européens s'étaient efforcés de rendre le nouveau monde semblable à l'ancien.  page 87

Wilson un ex-flic blanc, écrivain - ,ne parvenait pas à comprendre comment fonctionnaient les rapports sociaux chez les Indiens  il ne savait pas que, dans le monde indien, il n'existe pas beaucoup de différence entre un Indien riche et un Indien pauvre  en règle générale, un Indien est un Indien,  les rares qui acquièrent richesse et pouvoir en tant qu'avocats, hommes d'affaires, artistes ou médecins peuvent épouser des Blancs et n'avoir que des amis blancs, mais dans l'ensemble, les Indiens qui appartiennent à des classes sociales différentes se mêlent sans problème les uns aux autres  la plupart sont chômeurs ou sous-payés, quelques-uns seulement ont un bon métier et des revenus stables page 190

(Truck, un animateur de radio:) Eh bien, citoyens, nous donnons aux Indiens tout ce qu'ils veulent nous leur donnons des  droits de pêche, des territoires de chasse, nous leur permettons de construire  des casinos illégaux sur leurs terres. Ils ont des droits que les Américains normaux n'ont pas. Les Indiens sont devenus des super-citoyens qui profitent de tous les avantages d'être américains tout en bénéficiant de privilèges par le seul fait d'être indiens
Et nous leur donnons tout cela parce que nous sommes supposés avoir volé leur terre.  Les Indiens vivent mieux aujourd'hui qu'ils ne vivaient dans le passé. Ils ont du travail. Ils ont l'électricité et l'eau courante. Ils ont Dieu.  Citoyens, c'est un fait établi que les Indiens sont plus nombreux de nos jours qu'ils ne l'étaient  quand Christophe Colomb a découvert ces rivages;...Et malgré toutes ces prérogatives, les Indiens continuent à vivre dans la pauvreté. Ils vivent dans la crasse, mes amis. Les épaves de voitures s'entassent  dans leur cours,. Ils ont le plus fort taux de mortalité infantile. Ils ont le plus fort taux d'alcooliques et de  drogués. Ils connaissent encore le rachitisme, vous vous rendez compte?  On leur donne tout et ils sont incapables de prendre soin d'eux-mêmes.  Page 217

lundi, mai 14, 2012

LES SAVANTS ( Manu Joseph)

Aujourd'hui, en Inde, on ne dit plus "intouchable" mais "dalit"'. Un mot, toutefois, suffit-il à changer la donne? Ce n'est pas l'avis d'Ayyan. D'un côté, du sien, une pièce minuscule partagée avec sa jeune épouse et son fils dans une exécrable cité de banlieue de Bombay, tandis qu'il exerce un emploi de secrétaire dans un institut de recherche de haut vol. De l'autre extrémité du spectre social, à l'Institut, les savants , les "brahmanes" et , avec eux, tous les nantis et leurs femmes inaccessibles, le regardent de haut.
Alors, à l'époque où le petit peuple indien, conscient de sa supériorité numérique,  acquiert un pouvoir politique de plus en plus important, Ayyan a une idée... Son fils est brillant. Pourquoi ne pas  donner, discrètement,  un coup de pouce au destin, ne pas compenser les injustices de la naissance et du système de castes? Fort de ce qu'il apprend à l'Institut en écoutant aux portes, Ayyan entretient le mythe d'un petit génie dalit.


Roman longuet...Intéressant car il brosse l'Inde , ses castes etc...

mardi, mai 08, 2012

MILLE FEMMES BLANCHES (Jim Fergus)

En 1875, un chef cheyenne demande au président Grant de lui faire présent de mille femmes blanches à marier à mille de ses guerriers afin de favoriser l'intégration. Prenant pour point de départ ce fait historique, Jim Fergus retrace à travers les carnets intimes d'une de ces femmes, May Dodd, les aventures dans les terres sauvages de l'Ouest de ces femmes recrutées pour la plupart dans les prisons ou les asiles psychiatriques. C'est un magnifique portrait de femmes qu'il nous offre ainsi , un chant d'amour pour le peuple indien, et une condamnation sans appel de la politique indienne du gouvernement américain d'alors.

Ma définition de l'asile d'aliénés: le lieu où l'on crée les fous. page 27 (May Dodd)

(Le capitaine de l'armée) L'expérience m'a appris, Madame, que les Indiens d'Amérique sont par nature parfaitement incapables de comprendre notre culture- de la même façon que notre race n'entend rien ou fort peu à leurs coutumes.page 70

En parlant de dégradation, je voulais vous dire seulement qu'en offrant aux Peaux-Rouges différents présents - sous forme d'aumônes ou de vivres- , l'Etat n'a rien fait d'autre que les encourager, comme des chiens que l'on nourrit sous la table, à en demander toujours plus.(le capitaine Bourke) page 84

Nous sommes bien minuscules, comparés à la puissance des éléments. Il n'y a rien d'étonnant que ces gens (les Indiens) soient si superstitieux face à eux. Ni qu'ils s'efforcent de gagner les bonnes grâces des dieux des quatre points cardinaux, du ciel et de la terre, sans compter les esprits des animaux sauvages et du temps, car nous vivons à leur merci. Dans cette optique, les Blancs bâtissent leurs forts et leurs  maisons, leurs entrepôts et leurs églises comme autant de remparts peu convaincants devant l'immensité d'une terre qu'ils sont incapables d 'aimer, d'un vide qu'ils tentent vainement de combler.page 302 (May Dodd)

mercredi, mai 02, 2012

LEON, L'AFRICAIN (Amin Maalouf)

Cette autobiographie imaginaire part d'une histoire vraie: Hassan Al-Wazzan raconte sa vie à son fils.Ce roman est facile à lire, le style est simple, on note beaucoup de détails historiques très intéressants, tels que la chute de Grenade, le souverain Mohamed Touré à Tombouctou, l'invasion du Caire par les Ottomans ou le sac de Rome par les soldats de Charles Quint.
 Le personnage Hassan Al-Wazan a existé. En 1518, un ambassadeur maghrébin , revenant de La Mecque, est capturé par des pirates siliciens qui l'offrent en cadeau au Pape de la Renaissance, Léon X. Il devint le géographe Jean-Léon de Médicis , dit Léon l'Africain. Homme d'Orient et d'Occident, homme d'Afrique et  d'Europe, on pouvait difficilement trouver dans l'histoire personnage dont la vie corresponde davantage à l'époque étonnante que fut le XVIè siècle.

lundi, avril 23, 2012

L'HISTOIRE DE CHICAGO MAY

L'HISTOIRE DE CHICAGO MAY (Nuala O'Faolain)

L'histoire de Chicago May est celle d'une jeune Irlandaise pauvre qui, en 1890, s'est enfuie de chez elle pour devenirune criminelle célèbre sous le nom de "Chicago May".

dimanche, avril 15, 2012

UNE CHINE SANS FEMMES? (Isabelle Attané)

Dans les pays où les femmes ne souffrent pas de discriminations, le rapport de masculinité , qui mesure la proportion d'hommes et de femmes, est toujours en faveur de ces dernières. La France, par exemple, compte 96 hommes pour 100 femmes. Les sociétés scandinaves, à l'avant-garde du progrès social, connaissent une proportion équivalente: 97 hommes pour 100 femmes... La Chine, en revanche , totalise plus de 106 hommes pour 100 femmes.Une majorité masculine qui gagne du terrain. pages 12, 13


Le mariage , une affaire d'argent.


Qu'il soit d'amour , de raison, arrangé ou le résultat d'un trafic, le mariage est avant tout une affaire d'argent, de séduction matérielle...Selon la tradition, les parents du marié offrent les meubles, l'argent...Mais le lot doit être attractif. Il doit contenir les "trois grandes conditions": un climatiseur, une télévision et un téléphone. En contrepartie, l'épouse doit être de préférence jolie, fertile et vertueuse. Dans les milieux citadins nantis, la femme chinoise est devenue très exigeante. A défaut de trouver le partenaire sexuel idéal, elle veut s'assurer que son époux lui fournira tout le confort matériel nécessaire dans une société où le paraître est devenu plus important que le bien-être: voiture, appartement redécoré, villa, produits de luxe étrangers... Il faut briller pour être respectée. page 87


Sous Mao, la femme n'existe plus, elle cède la place à la "camarade" femme...Les vestes sans taille et les pantalons au fond large, qui serrent les cous et les poignets, ne suggèrent pas les lignes du corps...page 114

L'idéal féminin de ce début du XXIè siècle est paré de tous les symboles de la société de consommation, de la richesse et de la satisfaction: tenues sophistiquées, bijoux, un mari qui a réussi, électroménager dernier cri, mobilier de luxe...Cette symbolique, soulignant la valeur de l'éphémère et du paraître, est clairement associée aux réformes: on a eu la chance de s'enrichir et on le montre! Comme si le bonheur ne dépendait plus aujourd'hui que de l'accès à ce monde de la consommation, à ce monde moderne très occidentalisé. page 118

La chirurgie esthétique est un commerce en pleine expansion....Les filles ne se satisfont pas du corps que "Dame Nature" leur a donné. page 119


Trait particulier, la prostituée chinoise , en général, une immigrée, n'officie pas chez elle. Sa famille ignore l'origien de l'argent qu'elle reçoit régulièrement de cette courageuse qui a quitté sa région natale...Ainsi, loin d eperdre la face, elle gagne l'estime familiale....Dix millions, c'es tle nombre estimé de femmes travaillant actuellement dans le commerce du sexe en Chine. page 149

"Les femmes soutiennent la moitié du ciel": quelques mots mais un argument choc.Car évoquer le ciel, c'est faire allusion au pouvoir suprême. Dans la Chine millénaire, l'empereur, c'est l"Empereur du Ciel" la Chine, c'est "l'Empire Céleste". Une belle preuve de confiance de la part de Mao dans la moitié féminine de la population.


A la campagne, les femmes doivent encore manger dans la cuisine quand la famille reçoit des invités. page 174


Dès janvier 1979, cette norme drastique de l'enfant unique s'applique à la quasi-totalité du pays. page 190


"Les couples doivent se marier tard et retarder la venue de leur(s) enfant(s). page 194


Tous, en ville comme à la campagne, sont en train de comprendre qu'avoir une famille nombreuse coûte cher, très cher même, et que si l'on veut avoir une chance de s'en sortir, il vaut mieux se contenter d'un ou deux enfants, juste ce qu'il faut pour assurer sa descendance et garantir ses vieux jours. page 224


C'est maintenant l'ère du "chacun pour soi", le règne de la " loi du plus fort". L'état se désengage du service public. La logique économique qui prévalait jusque là, assurant à chacun le minimum vital n'a plus cours.page 236


J'ai entendu dire qu'aujourd'hui, les entreprises préfèrent employer des hommes. Alors, pour trouver un emploi, nous les femmes n'avons pas d'autre choix que de nous déguiser en homme. Page 275


Aujourd'hui, comme par le passé, multiplier les épouses est un symbole d'aisance et de réussite sociale , et la pratique des ernai (des maîtresses) , un produit de la société patriarcale. page 308






mardi, mars 27, 2012

ACCABADORA ( Michela Murgia)

Dans un petit village sarde, la vieille couturière, Tona Bonaria, accueille chez elle Maria "cédée" bien volontiers par une veuve d'humbles origines.

Elle offrira à sa" fille d'âme" son métier et des études, choix audacieux pour une femme dans une Sardaigne des années cinquante.

Maria grandit entourée de soins et de tendresse; mais certains aspects de la vie de Tona Bonaria la troublent, en particulier ses mystérieuses absences nocturnes.

Elle ignore, en effet, que la vieille couturière est, pour ses concitoyens,"l'accabadora", la "dernière mère". Le jour où ce secret lui sera dévoilé, sa vie sera définitivement bouleversée et il faudra bien des années pour que "la fille d'âme" arrive enfin à pardonner à sa mère adoptive.

Dans une langue poétique et essentielle, Michela Murgia décrit les plis et les replis les plus intimes du rapport très singulier unissant la vieille Tona Bonaria et la jeune Maria, dans une Sardaigne atemporelle, aux us et coutumes fascinants.

samedi, mars 17, 2012

LE BON LARRON ( Hannah Tinti)

L'auteur ressuscite l'Amérique du XIXè siècle, celle de Melville et de Mark Twain. Un enfant de douze ans, Ren, qui n'a connu que l'orphelinat, se trouve plongé dans une cour des miracles, un monde de voleurs, de marginaux, de grands escrocs et de nantis maléfiques.
Tout ce récit fait penser à Dickens qui décrit l'Angleterre de cette époque.

jeudi, mars 08, 2012

VIVRE (Yu Hua) tome 2

Ce livre bouleversant retrace la vie de millions de familles chinoises. Il montre la Chine profonde, mais aussi son histoire tourmentée et sa culture ancestrale à travers une famile ordinaire.


Les 2 tomes : un voyageur rencontre un jour un étonnant vieillard labourant son champ. Il l'écoute raconter sa vie: enfant gâté dans une famille aisée, Fugui devient un joueur invétéré et conduit les siens à la ruine. Contraint de mener une vie de simple paysan, il partage l'existence des plus pauvres ainsi que les tempêtes de la révolution chinoise.


Le tome 2 commence par l'époque de la fin des cantines municipales, il n'y a plus rien à manger. Chaque famille qui avait détruit tous les ustensiles de cuisine, doit en acheter et mangera à la maison comme avant mais il n'y a plus de provisions. Chaque personne doit travailler dans les champs et le chef donne à chaque travailleur un nombre de points selon la qualité du travail. C'est la période de famine en Chine. Puis ce'est la période de la Révolution culturelle avec les " dazibaos".

jeudi, mars 01, 2012

BROTHERS (Yu Hua)

Ce livre décrit un demi-siècle d'histoire chinoise qui défile sous nos yeux, des années 1960 et 1970, marquées par la répression morale et les atrocités politiques avec la Révolution culturelle, - une époque de fanatisme, de répression et de tragédies - à l'époque contemporaine, l'ère des "réformes "et de "l'ouverture,"où les énergies individuelles se libèrent dans un désordre épique - une époque de subversion de la morale, de légèreté et de permissivité, l'ère de tous les possibles - Un couple de "faux" frères Li Guangtou et Song Wang fait le lien entre les deux époques: leurs existences se fissurent dans un monde qui se fissure, leurs joies et leurs peines explosent dans un monde qui explose, leurs destins sont emportés dans les bouleversements de ces deux époques. Ils résument à eux deux une transition vécue par des millions de Chinois .


Avec ce roman qui contient l'expérience de toute une génération, celle de la faim, de la violence, celle de la frénésie économique et des grandes migrations, des ascensions fulgurantes et des naufrages individuels, Yu Hua a écrit une véritable odyssée de la Chine de Mao aux JO.

mercredi, février 15, 2012

DANS LES FORETS DE SIBERIE ( Sylvain Tesson)

Je suis au seuil d'un rêve vieux de sept ans...Se lever de son lit demande une énergie formidable.. Surtout pour changer de vie. Cette envie de faire demi-tour lorsqu'on est au bord de la saisir. page 22

Vivre entre quatre murs de bois au milieu de marais glacés rend modeste....Le Romain bâtissait pour mille ans, pour le Russe, il s'agit de passer l'hiver. page 31

Quand on se méfie de la pauvreté de sa vie intérieure, il faut emporter de bons livres: on pourra toujours remplir son propre vide. page32

Etre seul, c'est entendre le silence. page 36

La sobriété de l'ermite est de ne pas s'encombrer d'objets, ni de semblables. De se déshabituer de ses anciens besoins. Le luxe de l'ermite, c'est la beauté. Son regard où qu'il se pose, découvre une absolue splendeur. Page 48

La solitude est une patrie peuplée du souvenir des autres. Y penser console de l'absence. Les miens sont là, dans un repli de ma mémoire. Je les vois. page 51

Les société n'aiment pas les ermites. Elles ne leur pardonnent pas de fuir. Elles réprouvent la désinvolture du solitaire qui jette son "continuez sans moi" à la face des autres. Se retirer, c'est prendre congé de ses semblables. L'ermite nie la vocation de la civilisation, en constitue la crtique vivante. Il souille le contrat social. page 58

(L'auteur a reçu dans sa cabane une touriste australienne et Youra, un météorologue russe. après de squestions stupides: Do you have a car? A TV? etc..il écrit) Je préfère les natures humaines qui ressemblent aux lacs gelés à celles qui ressemblent aux marais. Les premiers sont durs et froids en surface mais profonds, tourmentés et vivants en dessous. Le seconds sont doux et spongieux d'apparence mais leur fond est inerte et imperméable. page 59

Et si la liberté consistait à posséder le temps?Et si le bonheur revenait à disposer de solitude d'espace et de silence? Toutes choses dont manquerons les générations futures. Tant qu'il y aura des cabanes au fond des bois, rien ne sera tout à fait perdu.


La vie dans les bois conduit à se dégraisser On s'allège de ce qui encombre, on déleste l'aérostat de son existence...Il existe un rapport proportionnel entre la rareté des choses que l'on possède et l'attachement qu'on leur porte. pages 61, 62




L'homme libre possède le temps. L'homme qui maitrise l'espace est simplement puissant...Dans la cabane, le temps se calme...On ne sait même pas qu'il est là. Je suis libre parce que mes jours le sont. page 72



Le bonheur est fugace comme une bouffée de cigare. page 75



Quand les hommes se concentrent, l'administration naît. Pour l'ermite, la régence administrative commence lorsqu'on est deux.Elle porte le nom de mariage. page 92



Pour parvenir au sentiment de liberté intérieure, il faut de l'espace à profusion et de la solitude. page 94

Le silence me revient (après le départ de visiteurs) , l'immense silence qui n'est pas l'absence de bruit mais la disparition de tout interlocuteur. page 100


Le bonheur d'avoir dans son assiette le poisson qu'on a pêché, dans sa tasse, l'eau qu'on a tirée et dans son poêle, le bois qu'on a fendu: l'ermite puise à la source,. La chair, l'eau, le bois sont encore frémissants. page 119

L'ermitage reserre les ambitions aux proportions du possible. page 134

L'anarchiste rêve de détruire la société dans laquelle il se fond.Le hacker aujourd'hui fomente l'écroulement de sociétés virtuelles depuis sa chambre. Le premier bricole ses bombes dans des tavernes, le second arme des programmes depuis son ordinateur. Tous deux ont besoin de la société honnie. Elle constitue leur cible et la destruction de la cible est leur raison d'être. L'ermite se tient à l'écart., dans un refus poli. Il ressemble au convive qui, d'un geste doux, refuse un plat . Si la société disparaissait, l'ermite poursuivrait sa vie d'ermite. Les révoltés, eux, seraient en chômage technique. L'ermite ne s'oppose pas, il épouse un mode de vie. Il ne dénonce pas le mensonge, il cherche une vérité. Page 148






Avoir peu à faire entraîne une attention à toute chose...


Il y a une jouissance à tenir en ordre son intérieur. page 166



On dispose de tout ce qu'il faut lorqu'on organise sa vie autour de l'idée de ne rien posséder. page 176


Autour du cou je porte une petite croix orthodoxe...Dans mon rêve d'enfance, un Robinson des bois à barbe blonde ne pouvait se passer de la croix du Christ sur le poitrail. J'aime cet homme qui pardonnait aux femmes adultères, marchait sur les routes la bouche pleine de paraboles pessimistes, conspuait les bourgeois et s'en fut se suicider au sommet d'une colline où il savait que l'attendait la mort. Je me sens de la chrétienté, ces étendues où les hommes, décidant de vénérer un dieu qui professait l'amour, autorisèrent la liberté, la raison et la justice à envahir le champ de leurs cités. Mais ce qui me retient, c'est le christianisme, ce nom que l'on donne au tripatouillage de la parole évangélique par un clergé , cette alchimie de sorciers à tiares et à clochettes qui ont transformé une parole brûlante en code pénal. Le Christ aurait dû être un dieu grec. page 192




Vivre, c'est continuer et il y a une défaite dans le retour sur ses pas.page 211


Lire compulsivement affranchit du souci de cheminer dans la forêt de la méditation à la recherche de clairières. page 248


Aujourd'hui, quand on rencontre quelqu'un, juste après une poignée de main et un regard furtif, on note les noms des sites et des blogs. La séance devant les écrans a remplacé la conversation. Après la rencontre, on ne conservera pas le souvenir des visages ou des timbres de voix mais on aura des cartes avec des numéros. La société humaine a réussi son rêve: se frotter les antennes à l'image des fourmis. Un jour, on se contentera de se renifler.page 250


Je suis venu ici, sans savoir si j'aurais la force de rester, je repars en sachant que je reviendrai. J'ai découvert qu'habiter le silence était une jouvence. J'ai appris deux ou trois choses que bien des gens savent sans recourir à l'enfermement. La virginité du temps est un trésor. Le défilé des heures est plus trépidant que l'abattage des kilomètres...J'ai appris à m'asseoir devant une fenêtre. Je me suis fondu à mon toyaume...Six mois comme une vie. page 264


Ma vie s'est dépliée ici pendant des mois. Je la replie...C'est fini. Demain, le retour. page 266








mardi, février 14, 2012

LE VENTRE DE L'ATLANTIQUE (Fatou Diome)

Salie vit en France, son frère Madické rêve de l'y rejoindre et compte sur elle. Mais comment lui expliquer la face cachée de l'immigration. Le Ventre de l'Atlantique charrie entre l'Europe et l'Afrique des destins contrastés saisis dans le tourbillon des sentiments.

La pauvreté, c'est la face visible de l'enfer, mieux vaut mourir que de rester pauvre. page 34

Quand on vient de France, on peut épouser qui on veut, il (l'homme de Barbès) le savait. En revanche, personne ne pouvait se targuer de connaître son activité en France. A son arrivée (chez lui, au Sénégal) on se contenta d'admirer son pouvoir d'achat, faramineux par rapport à la moyenne de l'île. Lui, au moins, pouvait se permette de remplacer l'éternel riz au poisson par un délicieux riz au poulet. A son troisième congé, il commença à bâtir son imposante demeure...Cette maison lui assurerait à jamais le respect et l'admiration des villageois. ...A son septième voyage, l'homme de Barbès se construisit une boutique bien approvisionnée à l'entrée de sa demeure et s'installa définitivement au village. Devenu l'emblême de l'émigration réussie, on lui demandait son avis sur tout. page 37



Après la colonisation historiquement reconnue, règne maintenant une sorte de colonisation mentale: ...tout ce qui est enviable vient de France. Tenez, par exemple, la seule télévision, ...elle vient de France, Son propriétaire , devenu un notable au village, a vécu en France. L'instituteur, très savant, a fait une partie de ses études en France. Tous ceux qui occupent des postes importants au pays , ont étudié en France. page 60




Déraciné, Ndétare (l'instituteur) avait su , dès son arrivée, mettre à profit l'adage sévère selon lequel l'ouie et la vue seraient les meilleures hôtesses d'acueil. Il avait regardé, longtemps observé; avait tendu l'oreille, beaucoup entendu et fournissait l'effort nécessaire à son adaptation. Mais son intégration était partielle. Cette société insulaire, même lorsqu'elle se laisse approcher, reste une structure monolithique impénétrable qui ne digère jamais les corps étrangers. page 87


Mon frère galopait vers ses rêves, de plus en plus vers la France.page 93

Les amitiés d'enfance résistent parfois au temps, jamais à la distance; la différence des itinéraires nous sépare et ne nous laisse qu'une liste de prénoms qui, petit à petit, perdent leur tête et leur mélodie autrefois rassurante. page 209

Je pensais à ma vie solitaire en Europe, où personne ne se soucie de mes allées et venues, où seule ma serrure compte mes heures d'absence. Un é-mail ou un message sur le répondeur téléphonique, ça ne sourit pas, ça ne s'inquiète pas, ça ne s'impatiente pas, ça ne vide pas une tasse de café, encore moins un coeur plein de mélancolie. page 220

samedi, février 04, 2012

DESIR NOMADE ( Véronique Elfakir)

"Un touriste, c'est une personne qui pense à rentrer à peine vient-elle d'arriver"

- Alors qu'un voyageur pourrait ne plus rentrer".


Le voyage semble s'apparenter à une sorte de fuite ou de désir de rupture par rapport à une modernité vécue comme aliénante.

Mais "partir", à notre sens, ce n'est pas seulement "aller contre"ou tenter de se défaireau loin d'une réalité contraignante mais c'est aussi et plus fondamentalement "devenir autre";, renaître ailleurs à une nouvelle forme d'existence et d'intériorité en s'éprouvant comme différent, tenter de se changer en changeant de vie. page15


...le départ n'est pas seulement rupture mais aussi construction et création.


Je n'ai pas lu ce livre en entier: trop de psychanalyse. L'auteur étudie les écrivains voyageurs: Ségalen, Bouvier, Rimbaud, De Nerval, Michaux, Bowles.

mardi, janvier 31, 2012

LE LOUP DES PLAINES (Conn Iggulden)

L'histoire de Gengis Khan au XIIè siècle.
Epopée grandiose , ce roman relate les jeunes années du futur Gengis Khan., un homme à l'incroyable destin, qui bâtira un empire plus vaste et plus puissant que ceux d'Alexandre Le Grand et de Jules César.

"On ne peut pas laisser son courage dans un sac comme les osselets. Il faut sans cesse le sortir à la lumière et le faire croître. Si tu crois le garder pour le jour où tu en aurais besoin, tu te trompes. Il est comme tout ce qui fait ta force. Si tu le délaisses, le sac sera vide le jour où tu en auras le plus besoin." page 64

samedi, janvier 28, 2012

GALADIO ( Didier Daenincks)

L'Allemagne des années trente. Ulrich est un adolescent de Duisbourg comme les autres, mais sa peau est noire. Son père, soldat africain, est venu en Allemagne avec les troupes françaises d'occupation chargées de veiller à l'application du Traité de Versailles. Il est reparti en 1921, quelques mois avant la naissance de cet enfant. Hitler et les nationalistes dénoncent la "honte noire, symbole de l'asservissement délibéré du sang arien par les occupants. Leur sort ne sera en général guère plus enviable que celui des Juifs.




L'auteur s'appuie sur une documentation rigoureuse et très fouillée. Il révèle ici le sort terrible des Allemands métis dans un pays emporté par le délire nazi....

PLEURE GERONIMO (Forrest Carter)

La lutte héroïque des Apaches, peuple sans pouvoir politique, sans influence financière et sans amis dans la presse, est absente des pages de l'histoire. Pourtant cette lutte d'un petit peuple résistant aux tentatives de deux gouvernements puissants pour le réduire en esclavage et pour l'exterminer reste inégalée dans l'histoire. Page 226