samedi, août 18, 2012

LE VICE-ROI DE OUIDAH (Bruce Chatwin)

Le Vice-Roi de Ouidah s'inspire de l'histoire vraie, extraordinaire et picaresque, de Francisco Manuel, d'abord au Brésil puis au Dahomey, de sa jeunesse à l'âge adulte, de ses rapports avec le roi du Dahomey qui le fait riche - puis le jette en prison. Sauvé par le demi-frère du roi,  Francisco le remercie en le hissant sur le trône et le nouveau roi accorde à l'apatride le monopole du commerce des esclaves. Francisco multiplie femme et maîtresses, les enfants et va jusqu'à créer au Dahomey  une espèce de petit Brésil, où il accueille les esclaves libérés qui , du Brésil, reviennent au pays natal...Il importe donc ceux-là même qu'il a déportés!
Ce livre de Chatwin souligne la terrible ambiguïté du commerce des esclaves et rend cet ouvrage passionnant.

"Il était (Francisco ) arrivé de San Salvador de Bahia en 1812 , et pendant plus de trente ans, fut le "meilleur ami" du roi du Dahomey, l'approvisionnant régulièrement en rhum, en tabac, en parures, en fusils Long Dane (qui en dépit de leur appellation, n'étaient pas fabriqués au Danemark mais à Birmingham). En échange, il put profiter  du titre de Vice-Roi de Ouidah, du monopole de vente des esclaves, d'une cave de chateau-margaux et d'un inépuisable sérail de femmes.A sa mort , en, 1857, il laissa soixante-trois fils mulâtres et une quantité inconnue de filles. pages 16, 17

La vie des Da Silva (descendants de Francisco) les plus âgés, était vide et triste. Ils regrettaient la traite des Noirs, âge d'or où leur famille était riche, célèbre et blanche. page 18

En 1887, Cândido Da Silva, le plus jeune fils de Dom Francisco , fut élu chef de famille pour l'habilité qu'il montrait  à rétablir la fortune des Da Silva. Il obtint même que le roi du Dahomey signe de sa croix un document qui faisait de Ouidah un protectorat portugais. page 57

Da Silva rêvait toujours de Bahia...et écrivait des lettres à Joaquim Coutinho...Il implorait des nouvelles, pour empêcher ses souvenirs de s'estomper; mais les réponses de Joaquim étaient invariablement froides et commerciales: "Par notre brick Legitimo Africano, j'ai reçu ce jour ton chargement de 230 articles(des esclaves)...Je déplore la perte d'un tiers due à une épidémie de dysenterie. Les femmes résistent beaucoup mieux que les hommes et j'aimerais connaître ton opinion à ce sujet." page 134

Aucun capitaine ne pouvait échapper aux garde-côtes. Aucun ne pouvait embarquer un esclave sans payer une taxe d'exportation ou débarquer une balle de coton sans acquitter un droit.page 163

En 1838, la traite des nègres n'était plus une profession pour un gentleman brésilien....Voilà dix ans que c'était devenu un délit criminel. Pourtant le commerce des esclaves prospérait  sans qu'aucune poursuite ne soit engagée et les planteurs de café du Sud réclamaient des esclaves à cor et à cri, mais le nouveau commerce était tombé aux mains de riches portugais que leurs méthodes commerciales rendaient particulièrement impopulaires.Les Brésiliens libéraux détestaient l'esclavage pour des raisons morales et les conservateurs s'en méfiaient pour des raisons pratiques: il y avait trop de Noirs au Brésil. page 177

Les premiers "Brésiliens" de Ouidah furent une cargaison d'anciens esclaves  qui avaient acheté leur liberté  et nolisé un navire de commerce anglais pour les ramener en Afrique....Les " Brésiliens" firent de Ouidah un petit Brésil . Chaque samedi, Dom Francesco recevait à dîner les chefs de la colonie.Page 190, 191

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