lundi, mai 04, 2009

LES MAREES DU FAOU (Philippe LE GUILLOU)

Le regard que l'on porte sur l'enfance est ce qu'il y a dans l'être de plus intime, de plus révélateur et de plus secret aussi que le désir, la quête spirituelle ou les failles et les mystères qui nous poussent à créer. page 20
Il (Gabriel, le grand'père maternel de l'auteur) s'installait sur un banc, il regardait le large, seul ou en compagnie de quelques anciens de la Marine qu'il trouvait là, cette petite société parlait peu, elle contemplait, jusqu'à l'hébétude, les rouleaux d'écume et les courants qui ridaient le flot. Rien ne valait pour lui ces instants d'adoration muette. La mer, en fin de journée, était blonde, presque dorée, c'était d ela bière ou une émulsion d'or qui arrivait des lointains de Camaret et de la Pointe des Espagnols, elle remplissait le port, la saignée de la rivière, elle venait lècher les assises de l'église, dont elle inondait régulièrement les fondations. Gabriel n'avait pas besoin de parler. Les cochou ne l'intéressaient plus. Il retrouvait la prégnance de ce mouvement mystérieux, les cadences de cette horloge marine qui avait rythmé sa vie tout au long des longues missions. Il ne savait plus où il était, mais une certitude l'éperonnait: il n'était pas au Faou, sur le môle de l'église, entouré de vieux ivrognes ressassant. Il était ailleurs, très loin, très en amont, auprès d'une eau blonde et mousseuse, dans les ports de l'ancienne Chine peut-être. Des femmes aux yeux verts et au corps de soie l'attendaient .Il était bien loin de ce Finistère où il avait souffert, où on l'avait désigné du doigt parce qu'il n'était pas tout à fait comme les autres. page 70

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