jeudi, octobre 04, 2007

LA FILLE AUX CISEAUX (Jorge Franco-Ramos)

A l'heure du bilan, il n'y avait plus qu'une seule histoire, celle de Rosario tentant en vain de gagner sa vie.
"Gagner quoi?" me demanda une fois Emilio qui n'y connaissait pas grand-chose.
Simplement gagner sur la vie, la faire plier, la tenir à ses pieds, comme un combattant humilié ou au moins se payer d 'illusions, comme nous le faisons, nous tous qui croyons résoudre le problème avec une profession, une épouse, une maison sûre et des enfants. page 33
"Marie-toi avec moi, Rosario, lui proposa Emilio.
-Tu es con ou quoi? lui répondit-elle.
-Pourquoi? Qu'est-ce-qu'il y a de bizarre? Puisque nous nous aimons.
-Et quel rapport entre l'amour et le mariage?
Elle avait vu ce qui clochait dans cette association que tout le monde fait entre amour et mariage. page 49
La famille d 'Emilio appartient à l'aristocratie créole, tares et arbres généalogiques compris. Ils font partie de ceux qui ne font jamais la queue parce qu'ils estiment qu'ils ne le méritent pas, qui ne paient personne car ils croient que leur nom de famille leur vaut crédit, qui parlent anglais parce qu'ils pensent que c'est plus chic et qui préfèrent les Etats -Unis à leur pays. Emilio a toujours tenté de se révolter contre ce schéma. page 50
De la fenêtre de l'hôpital, Medellin ressemble à une crèche. De petites lumières incrustées dans les montagnes scintillent comme des étoiles.Les immeubles éclairés lui donnent l'allure de grand bazar cosmopolitain, un air de grandeur qui nous fait penser que nous avons vaincu le sous-développement. Le métro la traverse en son milieu, et la première fois que nous le vîmes circuler, nous crûmes que nous avions enfin cessé d'être pauvres. page 40
-Tu n'as pas peur de la mort, Rosario? lui demandai-je.
-De la mienne, non, de celle des autres, si. Et toi?
- Moi, j'ai peur de tout Rosario.
Je n'ai pas su si elle faisait allusion à la mort de ses victimes ou à celle des êtres qui lui étaient chers. page 71

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