mardi, août 23, 2011

LE PAPALAGUI (Erich Scheurmann)

Les paroles de Touiavii recueillies par Erich Scheumann.

Touiavii , le chef de la tribu de Tiavéa, a observé de près cet être étrange qu'est la Papalagui et en dresse un portait plus éclairé que ne pourrait le faire un ethnologue:

- le papalagui étouffe son corps avec des peaux lourdes et serrées qui le privent de soleil;
- le papalagui vit dans des coffres de pierre empilés, séparés par des fentes bruyantes et grises;
-Le Papalagui est obsédé par le métal rond et le papier lourd qui régissent sa vie;
- Le papalagui a inventé un objet qui compte le temps; depuis, il court sans cesse derrière;
Le papalagui a développé bien d'autres maladies et comportements absurdes...
Alors le sage Touiavii, qui vit dans les îles Samoa aimerait bien que son peuple ne devienne pas comme le Papalagui, ce curieux homme blanc qui vit en Europe.

"Chers frères lucides, nous sommes tous pauvres. Notre pays est le plus pauvre sous le soleil. Nous n'avons pas assez de métal rond ni de papier lourd pour remplir un coffre. Dans la pensée du Papalagui, nous sommes des mendiants misérables. Et cependant! Quand je regarde vos yeux et les compare à ceux des riches alii (le monsieur, le noble), je les trouve bien ternes, altérés et fatigués, tandis que les vôtres rayonnent de joie, d'énergie, de vie et de santé. Ces yeux-là, je les ai trouvés seulement chez les enfants du Papalagui avant qu'ils sachent parler., ils ne savent rien de l'argent...page 51

Quand l'homme a besoin de beaucoup de choses, il est dans une grande pauvreté, car il prouve en cela qu'il est démuni des choses du Grand Esprit. La Papalagui est pauvre parce qu'il est possédé par les objets. Il ne peut plus vivre sans les objets. Page 58

Maintenant, les hommes blancs voudraient nous apporter leurs trésors pour que nous devenions riches aussi , riches de leurs choses. Mais ces choses ne sont que des flèches empoisonnées et celui dont elles frappent la poitrine meurt. "Nous devons les amener à avoir des besoins.", j'ai entendu dire cela par un homme qui connaît bien notre pays. Les besoins, ce sont des objets. "Ensuite, ils consentiront à travailler! " a poursuivi l'homme intelligent. page 61

Où que tu ailles chez le Paplagui et quoi que tu voies, que cela soit un fruit , un arbre, une eau, une forêt ou un petit tas de terre, toujours, partout, il ya quelqu'un à côté qui dit: " c'est à moi! Fais attention de ne pas prendre ce qui est à moi! " Si toutefois, tu prends quelque chose,aussitôt il crie et t'appelle "voleur", mot qui jette une grande honte sur toi, et seulement parce que tu t'es permis de toucher un mien de ton prochain. page 74


Quand je traverse un village à cheval, j'avance sans doute plus rapidement, mais quand je suis à pied, je vois plus de choses et mes amis m'invitent dans leur hutte. Atteindre vite son but a rarement un vrai intérêt. Le Papalagui veut toujours aller vite. La plupart de ses machines ne servent qu'à aller vite. Est-il quelque part, qu'un ailleurs l'appelle. Ainsi court le Papalangui sans arrêt tout au long de sa vie, oubliant de plus en plus la promenade, la marche et le joyeux mouvement vers la destination qui vient à nous, sans que nous l'ayons cherchée. page 88


Le Papalagui se nomme chrétien. Ce mot sonne comme un chant très doux. Puissions-nous nous appeler chrétiens tous les temps! Etre chrétien, cela veut dire: avoir de l'Amour pour le Grand-Dieu et pour ses frères et ensuite pour soi-même. L'Amour - c'est faire le bien -doit être en nous comme notre sang., et complètement avec nous comme la tête et mes mains. Le Papalagui a les mots Christ, Dieu et Amour seulement dans la bouche. Il remue la langue et fait beaucoup de bruit avec ces mots. Malheureusement, son coeur et son corps ne s'inclinent pas devant Dieu, mais seulement devant le métal rond et le papier lourd, devant les pensées de plaisir et devant les machines...Après réflexion, je me dis que le Papalagui nous a apporté l'Evangile comme une monnaie d'échange pour s'accaparer nos fruits et la plus grande et la plus belle partie de notre pays. Je le crois bien capable de cela car j'ai découvert beaucoup de saletés et beaucoup de péchés au fond du coeur du Papalagui et je sais que Dieu nous aime plus que lui, nous, qu'il appelle des sauvages, c'est -à-dire des hommes qui ont des dents de l'animal et pas de coeur dans le corps. page 132

Aucun commentaire: