Nous en venons et nous y retournons. Pourtant, nous ne pouvons rien en dire. Le néant - qui n'est rien, ni le vide - reste l'inconnu fondamental, le non- être, sans sensation, sans conscience et sans mémoire.
Pour m'en approcher, prudemment, je me suis lancé dans une promenade, au hasard des chemins, en reprenant un vieux thème persan. J'ai voulu voir comment d'autres ont réagi, ici ou là, dans l'histoire du monde, au plus secret, au plus insistant es mystères. J'ai découvert au passage, plusieurs attitudes qui peuvent paraître contradictoires. Chacun peut choisir.
C'est banal à dire, nous sommes tous emportés par un mouvement irrésistible. Il est notre maître, et nous ne savons où il conduit. Rien ne reste, rie n ne revient. pour peupler ce passage où il n'y a "rien" ( "N'y a-t-il rien dans ce rien?") se demandait Chateaubriand), nous avons, au long des siècles, imaginé toute une farandole de monstres, de fantômes, des hurlements, dont un grand nombre sont évoqués ici.
Avec quelques questions inévitables: comment nous protéger du désespoir et de la vanité de toutes nos vies, si nous n'en devons rien garder?
Comment , peut-être, en tirer une force, et même une joie?
Pourquoi rire? Pourquoi pleurer?
Et pourquoi rêver d'immortalité?
Chacun aura sa part de douleur et de deuil, plus ou moins sévère. C'est garanti dès le départ. ...Et chacun mourra, un jour ou l'autre. ...Etre ou ne pas être, nous n'avons pas le choix. D'autres ont pris la décision à notre place. " L'homme naît libre " écrivait Rousseau. Faux, archifaux. Il n'est même pas libre de naître. page 12
La mort est souvent du sexe féminin, tout comme la mère qui donne la vie ( sauf en allemand) . elle est même souvent un personnage, qui vient nous visiter à l'improviste ou bien nous prévenir que la date approche; une femme redoutable que nous essayons de tromper, de séduire, ou qu'elle nous accorde un sursis - ce qui arrive rarement. page 16
La mort est la fin de toute vie, et la vie sur la Terre est tout ce que nous avons. ....La mort nous aide à en apprécier les joies et tout simplement les plaisirs , même passagers , même menacés, même frelatés parfois. page 18
Le néant est inconnaissable. Il n'a pas son contraire, il ne peut présenter aucune équivalence . et n'étant rien, il ne peut se comparer à rien. page 20
Le Temps est la plupart du temps masculin, alors que la mort est féminin. page 22
On est ou on n'est pas. Il est impossible "d'être mort". page 23
Si je pense, et par conséquent si je suis, si je respire, si je me déplace, si j'écris, si je regarde autour de moi, c'est parce que mon sang circule dans mes vaisseaux , poussé par le coeur, et irrigue, entre autres organes, mon cerveau page 26
Si nous restons attentifs, quel que soit notre âge, à ce qui se passe autour de nous, il nous est facile de voir que l'écriture, par exemple, cet exercice dont nous étions si fiers, est en train de s'effacer. L'écriture à la main, qui faisait autrefois le prestige des scribes, des mandarins et des clercs, ( et le gagne-pain des écrivains publics) disparaît peu à peu. Nous tapons des touches, , mais nous n'écrivons plus. Nous pouvons même dicter à un petit appareil portable tel ou tel texte et faire croire que nous savons écrire, sans aucune faute. Nous ne formons plus les lettres et les mots de nos propres mains mais, ce qui faisait naguère le bonheur des graphologues. Avouons-le, nous avons tous, désormais, la même écriture. Bientôt, nous n'aurons même plus de lettres, ni de mots, mais des signes que nous placerons les uns à côté des autres et que nous serons compris partout dans le monde...Adieu l'écriture personnelle...Adieu la correction manuscrite, adieu même la dédicace et le mot d'amour. page 32
Nous croyons nous fixer, acquérir une identité, un nom, un territoire, nous nous trompons, nous sommes des errants, nous allons ici et là, aux hasards de la marche du monde; des nomades comme si le mouvement , en tout cas , le déplacement , était plus près de la vérité que la stabilité armée, que les barbelés,; que les enclos des sédentaires. page 37
La Terre est semée d'escales possibles, d'arrêts plaisants. Ici ou ailleurs, à l'ombre aussi bien qu'au soleil. page 39
Vieillir est le seul moyen que nous avons trouvé pour vivre plus longtemps. Page 40
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