jeudi, décembre 30, 2021

DES MILLIERS DE LUNES ( Sébastien BARRY) 2021

 Bien qu'il s'agisse d'une histoire à part entière, nous retrouvons Winona Cole, la jeune orpheline indienne lakota du roman DES JOURS SANS FIN , et sa vie dans la petite ville de paris, Tennessee, quelques années après la guerre de Sécession. Winona grandit au sein d'un foyer peu ordinaire, dans une ferme à l'ouest du Tennessee , élevée par John Cole, son père adoptif et son compagnon d'armes, Thomas McNulty. Cette drôle de petite famille tente de joindre les deux bouts dans la ferme de Lige Magan avec l'aide  de deux esclaves affranchis, Tennesson Bouguereau et sa soeur Rosalee.  Ils s'efforcent de garder à distance la brutalité du monde et leurs souvenirs du passé. Mais l'était de Tennessee est toujours déchiré par le cruel héritage de la guerre civile, et quand Winona puis Tennyson sont violemment attaqués par des inconnus, le colonel Purton décide de rassembler la population pour les disperser. 

Magnifiquement écrit, vibrant de l'esprit impérieux d'une jeune fille au seuil de l'âge adulte, Des milliers de lunes est un roman sur l'identité et la mémoire, une sublime histoire d'amour et de rédemption. 

La faiblesse de Thomas McNulty, c'est qu'il était pauvre. On était tous pauvres. Lige Magan était pauvre, lui aussi, alors qu'il possédait la ferme, et nous, on était plus pauvres que Lige. Bien plus pauvres que Lige. page 14

Thomas McNulty n'était pas une vraie mère, mais presque. de temps en temps, il enfilait même une robe. ....Un descendant de Polonais ayant émigré en Amérique, mais ce qui comptait pour les habitants de Paris, c'est qu'il était blanc. C'était un Blanc. page 21

Mais on était pauvres, et deux d'entre nous étaient indiens. Et comme j'ai dit, ce n'était pas un crime de frapper un Indien. page 24 (Winona  a été violemment frappée. ....Quand on  était pauvre en Amérique, il suffisait de donner l'impression d'avoir fait quelque chose de mal pour être pendu. page 26

Thomas McNulty disait toujours qu'il venait de rien. Au sens propre. Toute sa famille était morte là-bas , en Irlande, comme la mienne au Wyoming. Sa famille était morte de faim, et bien des Indiens étaient morts pour la même raison. Thomas disait venir de rien mais vivre maintenant en compagnie de rois et de reines.  Il ne le disait jamais que nous, nous n'étions rien. page 32

Ma mère avait dans notre tribu une réputation de grande bravoure...Elle savait repérer l'ennemi dans le paysage, même s'il se cachait. .....Un pasteur itinérant lui avait un jour demandé: " Quand es-tu donc arrivé en Amérique, Thomas? - " il y a cent ans" telle avait été sa réponse. Ma mère voyait le temps comme un cercle, une boucle et non  comme une corde tendue. A condition de marcher  assez longtemps, disait-elle, on pouvait rejoindre des personnes ayant vécu il y a longtemps, mais qui vivaient toujours. C'était impossible de marcher assez loin, expliquait-elle, mais ça ne signifie pas que cs personnes n'étaient pas là. ..Pourtant les soldats l'avaient tuée comme ils avaient mon père et mes oncles. Ils avaient tué ma soeur, mes tantes, et beaucoup d'autres encore.  page 39...Rien, rien, rien, nous n'étions rien...mais peut-être que c'est pour ça que Thomas McNully et John Cole  m'aimaient  parce que j'étais l'enfant de rien.   page 40

Tennessee Bougueneau..;en tant qu'ancien esclave, il ne pouvait porter une arme que dans le plus grand des secrets. pendant un temps, tout avait paru aller mieux pour les esclaves. Ils avaient déposé leurs outil dans les fermes où ils ne désiraient plus travailler. Ils avaient obtenu le droit de vote, les hommes en tout cas; Ils pouvaient soutenir le regard d'un Blanc et lui parler aussi droit que le tir d'une flèche. ça avait duré un temps. Maintenant , tout allait en sens inverse. les fermiers des environs n'avaient plus personne pour travailler dans leurs fermes si les Noirs ne le voulaient pas, et ça les rendait fous...;Il ne savait ni lire  ni écrire , mais il pouvait dessiner votre visage sur le joli papier de Rosalee....page 54

Ma mère m'avait appris à chasser la peur et à avoir un  courage de mille lunes. page 95

Le lundi de la Pentecôte est arrivé, c'était un jour où Lige nous donnait congé. Personne n'avait le droit de se baisser pour travailler ce jour-là. ....C'était un jour joyeux, même pour ceux qui n'avaient pas la joie en eux. Une joie qu'on pouvait emprunter afin que même les gens tristes en bénéficient. Puis Lige se levait avec son violon....On dégustait le cochon avec une joie solennelle et Rosalee chantait une vieille chanson dans une langue qu'elle - même ne comprenait pas.  mais qu'elle tenait de sa grand-mère quand elle était petite, Majestueuse Rosalee. ...;Je chassais alors ma tristesse et je montrais ce que je savais du monde par une folle danse lakota.  Le lundi de la ¨Pentecôte, c'était la liberté, le jour où l'amour était palpable entre nous. Cette façon dont John Cole caressait le dos de Thomas tandis que tous deux regardaient s'étirer  les longues ombres de mai. page 148

....Mais le passé, le présent, le futur, ça n'existe pas, ce que ma mère savait déjà. Il n'y a qu'une boucle qui tourne sans cesse.  page 151

Aucun commentaire: