dimanche, juillet 07, 2019

DES JOURS SANS FIN ( Sébastien Barry) 2016

Chassé de son pays d'origine par la Grande Famine, Thomas McNulty, jeune émigré irlandais, vient tenter sa chance en Amérique. Sa destinée se liera à celle de John Cole, l'ami et amour de sa vie.
Dans le récit de Thomas, la violence de l'Histoire se fait profondément ressentir dans le corps humain, livré à la faim, au froid, et parfois à une peur abjecte. Tour à tour, Thomas et John combattent les Indiens des grandes plaines de l'Ouest, se travestissent en femmes pour des spectacles, et s'engagent du côté de l'Union dans la guerre de Sécession.
Malgré la violence de ces fresques, se dessine cependant le portrait d'une famille aussi étrange que touchante, composée de ce couple inséparable, de Winona leur fille adoptive sioux bien-aimée et du vieux poète noir McSweny comme grand-père.
Sébastien Barry offre dans ce roman une réflexion sur ce qui vaut la peine d'être vécu dans une existence souvent âpre, entrecoupée d'un bonheur qui donne l'impression que le jour sera sans fin.
 
L'auteur s'est inspiré de l'histoire de son arrière grand oncle dont la photo orne la couverture du livre.
 
Jamais deux vauriens tirés de la poussière s'étaient autant amusés. ( Thomas et son ami John sont employés dans un saloon , ils dansent , déguisés en femmes etc...) page 22
 
(Ils s'engagent dans l'armée)  Au fond de nous, on savait que la mission serait les Indiens. Les colons de Californie voulaient qu'on les en débarrasse. Ils ne les voulaient plus en travers de leur chemin.  page 26
Le major disait qu'il  appréciait ces Indiens, qu'il ne voyait pas le problème avec ces pauvres hères, comme il les appelait. C'est pas les Indiens des plaines, il disait. ...Le major avait l'air mélancolique en disant ça, comme s'il en avait trop dit, ou bien en savait trop. page 27
 
Des vieux bateaux se sont mis à embarquer des gens ruinés ( en Irlande) à destination du canada, des gens qui avaient si faim qu'ils auraient été capables de se dévorer les uns les autres dans les cales. J'avais à peu près treize ans, mais au fond de moi, je savais que je devais partir. Alors, à la faveur de l'obscurité, je me suis glissé dans l'un de ces bateaux. C'était il y a longtemps, avant l'Amérique. j'ai passé six semaines parmi les d"chus, les ruinés, les affamés. Beaucoup ont fini par dessus bord, c'est comme ça que ça se passait. page 34
 
Vivre, c'est pas juste prendre et agir, c'est aussi réfléchir. Mais mon cerveau est fait pour englober le monde. Page 216
 
La vie n'est qu'une succession de moments difficiles en alternance avec des longues périodes où il ne se passe rien, à part boire de la chicorée, du whisky et jouer aux cartes.  page 155
 
Le visage de John Cole est si maigre qu'on voit à quoi il ressemblera dans  sa tombe. On est des morts qui tentent de revenir à la vie. page 175
 
Il faut avoir une bonne dose d'absurde en soi pour s'en sortir dans la vie.
 
Mais la fierté, c'est le petit déjeuner des imbéciles.
 
 Le major est un homme neuf, il a l'air aussi heureux qu'un canard sous la pluie. c'est bon de constater l'effet du mariage sur un homme comme lui, qui voit le monde comme un fardeau qu'il doit porter seul. page 80
Mme Neale est vraiment merveilleuse ( la femme du major) Chaque chose qu'elle dit contient de la grammaire. Elle s'exprime comme un évêque. Page 80
 
Notre chagrin s'élève vers les cieux en volutes; notre courage s'élève vers les cieux en volutes. De la honte s'y mêle, car le chagrin et le courage sont comme des ronces. page 92
 
(La guerre de Sécession commence.)
On  a une nouvelle mission à honorer en ce monde, nos cœurs en sont comblés.  page 127
" Ce qu'on vous demande, dit le capitaine, c'est de garder l'union dans votre cœur, et que son étoile guide vos pas. Votre pays attend  de vous quelque chose qui dépasse les capacités terrestres.  Il exige votre courage, votre force, votre dévotion et tout ce qu'il risque de vous offrir en retour, c'est la mort. " page 129
 
Cette fois, c'est pas courir vers les Indiens qui sont pas de votre espèce, c'est courir comme après un miroir de vous-même. page 136 (Les Confédérés)
 
"T'as pas envie d'aider les Noirs? Aider les  Noirs à obtenir leur liberté et consolider l'Union, mon gars? demande Dan Fitz Gerald.  C'est quoi ce truc de nègres? dit  Starling Carlton, je travaille pas pour les nègres, moi. Mais on voit qu'il plaisante. page 143
 
(lors d'un massacre de Sioux) Tout à coup, je ressens des chagrins de différentes sortes. La perte de certains camarades. Les morts dans les guerres. Le meurtre de Madame Neale, une femme si douce. Et quelque part derrière, d'autres encore. Les fantômes de ma famille disparue il y a si longtemps à Sligo. Un n om que j'ai à peine prononcé, même tout seul, en une décennie. La robe salie de ma mère surgit toit à coup devant mes yeux. La chasuble  de ma soeur abimée par la mort. Ces visages , maigres et froids. Mon père aussi fin qu'une traînée de beurre. Presque sans tache. Son grand chapeau noir écrasé à la manière d'un accordéon. Parfois, on sait qu'on est pas  très  intelligent. Pourtant, parfois, le brouillard de nos pensées se lève, et on comprend tout, comme si le paysage venait de se dégager. On se trompe en appelant ça sagesse, c'en  est pas. Il paraît qu'on est des chrétiens ou chose comme ça, mais c'est pas vrai. On nous raconte qu'on est des créatures de Dieu supérieures aux animaux, mais tout homme qui a vécu sait que ce sont des conneries. page 215
Vivre, c'est pas juste prendre et agir,  c'est aussi réfléchir. page 216
 
 
 

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