Ce recueil se compose de quatre essais écrits en 1936 et 1937, publiés en 1950.
Noces à Tipasa évoque un " jour de noces avec le monde". sur la plage de Tipasa, dans les odeurs sauvages de l'été d'Algérie, un jeune homme, fils d'une " race née du soleil et de la mer" chante sa joie de vivre dans la beauté et son orgueil de pouvoir aimer sans mesure
Le vent à Djémila. Au crépuscule, dans le décor tragique d'une ville morte traversée par le vent, l'auteur exprime sa " certitude consciente d'une mort sans espoir". Mais l'horreur même de cette mort ne l'en distraira pas. Jusqu'au bout, il sera lucide.
L'été à Alger. Description psychologique n d'une ville sans passé qui ignore le sens du mot vertu, mais qui a sa morale et où les hommes trouvent " pendant toute leur jeunesse une vie à la mesure de leur beauté.
Le désert. Partant de la leçon des grands peintres toscans, l'auteur s'approche de cette " double vérité du corps et de l'instant...qui doit nous en chanter mais périr à la fois. " Il découvre que l'accord qui unit un être à sa vie, dans un monde dont la beauté doit périr , est la "double conscience de son désir de durée et son destin de mort. " Notre salut est sur la terre où le bonheur peut naître de l'absence d'espoir.
TIPASSA
Au printemps, Tipassa est habitée par les dieux et les dieux parlent dans le soleil et l'odeur des absinthes, la mer cuirassée d'argent, le ciel bleu écru, les ruines couvertes de fleurs e tla lumière à gros bouillons dans les amas de pierres A certaines heures, la campagne est noire de soleil...page 13
Nous marchons à la rencontre de l'amour et du désir. Nous ne cherchons pas de leçons, ni l'amère philosophie qu'on demande à la grandeur. Hors du soleil, des baisers et des parfums, tout nous paraît futile. page 15
Ce n'est pas si facile devenir ce qu'on est, de retrouver sa mesure profonde. page 17
Tout ici, me laisse intact, je n'abandonne rien de moi-même, je ne revêts aucun masque: il me suffit d'apprendre patiemment la difficile science de vivre qui vaut bien tous leurs savoir-vivre. page 21
Pourquoi nierais-je la joie de vivre, si je ne sais pas tout renfermé dans la joie de vivre? Il n'y a pas de honte à être heureux. page 22
Il y a un temps pour vivre et un temps pour témoigner de vivre. Il y a aussi un temps pour créer, ce qui est moins naturel. Il me suffit de vivre de tout mon corps et de témoigner de tout mon coeur; page 23
LE VENT A DJEMILA
Il est des lieux où meurt l'esprit pour que naisse une vérité qui est sa négation.Lorsque je suis allé à Djemila, il y avait du vent et du soleil, mais c'est une autre histoire. Ce qu'il faut dire d'abord, c'et qu'il y régnait un grand silence lourd et sans félure. page 31
IL faut beaucoup de temps pour aller à Djemila. Ce n'est pas un eville où l'on s'arrête et que l'on dépasse. Elle ne mène nulle part et n'ouvre sur aucun pays. C'est un lieu d'où l'on revient La ville morte eest au terme d'une longue route en lacets...page 32
Comme le galet verni par les marées, j'étais poli par le vent, usé jusqu'à l'âme. page 34
Oui, je suis présent..;Comme un homme emprisonné à perpétuité - et tout lui est présent- Mais aussi comme un homme qui sait que demain sera semblable et tous les autres jours. Car pour un homme, prendre conscience de son présent, c'est ne plus rien attendre. page 36
Si je refuse tous les " plus tard" du monde, c'est qu'il s'agit aussi bien de ne pas renoncer à ma richesse présente. page 37
Un homme jeune regarde le monde face à face. Il n'a pas eu le temps de polir l'idée de mort ou de néant dont pourtant il a mâché l'horreur. page 38
Le seul progrès de la civilisation, celui auquel de temps en temps un homme s'attache, c'est de créer des morts conscientes. page 39
ALGER
Ce qu'on peut aimer à Alger, c'est ce dont tout le monde vit: la mer au tournant de chaque rue, un certain poids de soleil, la beauté de la race. page 47
Il faut sans doute vivre longtemps à Alger pour comprendre ce que peut avoir de desséchant un excès de biens naturels..Ce pays est sans leçons; Il ne promet ni ne fait entrevoir. Il se contente de donner, mais à profusion. ce qu'il exige, ce sont des âmes clairvoyantes, c'est - à - dire sans consolation. page 48
Il n'est pas une vérité qui ne porte avec elle son amertume. Comment s'étonner alors si le visage de ce pays, je ne l'aime qu'au milieu de ses hommes les plus pauvres? page 49
Ces silences n'ont pas tous la même qualité, selon qu'ils naissent de l'ombre ou du soleil. Il y a le silence de midi.;;Il y a le silence de la sieste..mais surtout, il y a les silence des soirs d'été. page 54
Le signe de la jeunesse, c'est peut-etre une vocation magnifique pour les bonheurs faciles. Mais surtout, c'est une précipitation à vivre qui touche au gaspillage..;la vie n'est pas à construire mais à brûler.page 59
" Tout passe disent les ex-voto en forme de coeur, sauf le souvenir" Et tous insistent sur cette éternité dérisoire que nous fournit à peu de frais le coeur de ceux qui nous aimèrent . Ce sont les mêmes phrases qui servent à tous les désespoirs. Elles s'adressent au mort et lui parlent à la deuxième personne. page 62
Sentir ses liens avec une terre , son amour pour quelques hommes, savoir qu'il est toujours un lieu où le coeur trouvera son accord, voici beaucoup de certitudes pour une seule vie d'homme. Et sans doute, ce la peut suffire. page 66
Je sais seulement que le ciel durera plus que moi. Et qu'appellerai-je éternité sinon ce qui continuera après moi. .Il n'est pas toujours facile d'être un homme, encore moins un homme pur. page 67
La vie d'un homme s'accomplit sans le secours de son esprit, avec ses reculs et ses avancées, à la fois, sa solitude et ses présences. page 68
Vivre ce n'est pas se résigner.page 70
LE DESERT ( A Jean Gernier)
Vivre, bien sûr, c'est un peu le contraire 'exprimer. Si j'en crois les grands maîtres toscans, c'est témoigner trois fois, dans le silence, la flamme et l'immobilité.page 77
Les mythes sont à la religion ce que la poésie est à la vérité, des masques ridicules posés sur la passion de vivre. page 91
Toute négation contient une floraison de "oui". page 98
Florence! un des seuls lieux d'Europe où j'ai compris qu'au coeur de mes révoltes dormait un consentement. Dans son ciel mêlé de larmes et de soleil, j'apprenais à consentir à la terre et à brûler dans la flamme sombre de ses fêtes. page 100
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